Fatale

Aimée a tout pour plaire aux nantis de Bléville : jeune, belle et veuve. Rapidement, elle s’intègre dans la petite communauté de cette ville de province rongée par l’habituel cocktail d’histoires de fesses et de fric. Aimée observe. Elle attend la crise, inévitable au vue de l’atmopshère délétère. Alors elle pourra enfin jouer carte sur table avec tous ces pourris, et les faire payer. Car ce que personne ne sait, c’est qu’Aimée est une tueuse de profession…

Par melville, le 16 septembre 2014

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Notre avis sur Fatale

Quand on parle des adaptations des romans de Jean-Patrick Manchette en bande dessinée, le nom de Tardi vient immédiatement à l’esprit. Il faut désormais compter aussi avec le duo Doug Headline (pseudonyme du fils de Manchette) et Max Cabanes. L’approche de Doug Headline/Cabanes est différente de celle de Tardi et c’est tant mieux. A eux deux ils proposent une lecture de l’œuvre de Manchette qui emprunte d’autre chemin et conduisent ainsi l’amateur à redécouvrir le roman orignal de Manchette (notons que ceux qui n’aurait pas lu le roman ne seront en rien lésé), un travail formidable !

Le style de Manchette à la fois vif et acéré comporte tout de même suffisamment de détails et se prête ainsi plutôt bien à l’adaptation. Mais ce qui semble être un avantage est aussi un piège dangereux : ce qui fonctionne dans le roman peut très rapidement perdre de sa tenue une fois transposé en images. Et c’est là que le « support bande dessinée » est totalement passionnant car il permet (contrairement au cinéma) de mêlé le texte écrit et l’image. Dans Fatale le texte est sous deux « formes ». La « voix off », directement rattachée au roman par la forme (à ce propos le choix d’une police typée machine à écrire n’est pas anodin) mais aussi dans sa nature même puisqu’il s’agit à quelques mots près du texte du roman. Les dialogues, avec leur police au style manuscrit, sont davantage reliés à l’image et donc en partie à l’adaptation. Il est passionnant de voir comment voix off, illustrations et dialogues se relaient l’un l’autre pour raconter l’histoire du roman.

Les auteurs ont fait le choix de la fidélité à l’original en conservant l’époque très marquée des années 70 mais par un formidable travail sur la couleur et le cadre, tel un grand chef opérateur Max Cabanes insuffle (ou révèle) la modernité du récit. En choisissant pour chaque scène une tonalité différente le dessinateur et coloriste donne du corps au récit et fait naître l’émotion avec subtilité chez le lecteur. S’inscrivant en plein dans la recherche esthétique de la bande dessinée contemporaine, Cabanes n’en oublie par pour autant la maîtrise. Naissent alors de cette confrontation des séquences absolument superbes.

Fatale est un polar sombre et méchant. Une charge contre les nantis (les pauvres n’intéressent pas Aimée, l’héroïne, comme il est dit) et un bouillonnement idéologique où s’entrechoquent nihilisme, anarchie et capitalisme. Un bain plus que revigorant en ces temps ternes. Mais Fatale c’est aussi et avant tout peut-être un très beau et cruel portrait de femme.

Un must à posséder de toute urgence ! Le grand coup de cœur de cette rentrée.

Par melville, le 16 septembre 2014

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