à la ligne
Cette BD est une adaptation du roman autobiographique de Joseph Ponthus publié en 2019, auteur malheureusement décédé jeune 2 ans plus tard.
Voici donc le récit de Joseph, trentenaire intérimaire dans l’agroalimentaire.
De mission en mission, il est amené à travailler à la chaîne, à la ligne, tantôt aux poissons, tantôt à l’abattoir. Cauchemars, persévérations, pensées obstruées, sont quelques ravages psychiques et physiques liés à ses conditions de travail.
Mais, bien que bousculé par ce milieu et cette cadence, le souhait de travailler prend le dessus.
Des brèves de vie, en dehors du travail, le raccrochent au vivant. Et Joseph se met à écrire pour raconter cette vie.
Sa culture son amour des mots et de la langue l’aident alors à surmonter les ravages du travail à la chaîne.
Par maude, le 27 janvier 2025
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Scénariste :
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dessinateur :
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Coloriste :
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Éditeur :
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Sortie :
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ISBN :
9782377317769
Notre avis sur à la ligne
Dans le roman autobiographique de Joseph Ponthus, l'auteur bouscule la syntaxe et donne la cadence en supprimant la ponctuation. Le titre « à la ligne » fait alors référence aux lignes de production des usines mais aussi au fait qu'en écrivant en vers libres, l'auteur revenait à la ligne à la fin de chaque phrase. Un comble pour cette BD remplie de points, de contrebalancer avec une œuvre originale où ils disparaissent complètement de la syntaxe.
Cette adaptation en BD s'éloigne de la forme de l'histoire de base au niveau du récit et de l'écriture mais semble très proche du fond et parait même l'enrichir d'un bel hommage à l’œuvre originale.
Détrompez-vous, la description de cet effroyable quotidien ne cache pas qu'une sombre réalité, il trouve de la beauté dans une routine faite d'atrocité et de répétition.
Il se plaît à décrire l'horreur mais aussi la paradoxale beauté du collectif et de l'entraide. Ce n'est pas uniquement une BD propre à des fins de lutte contre ces pratiques.
J'ai beaucoup apprécié les expressions parsemées à la lecture, l'idée d'« agent de la banalité du mal », de « salaud ordinaire » etc.. Le récit et le graphisme retranscrivent parfaitement l'ambiance et les ressentis de Joseph.
Il témoigne que le fait de partager la dureté de ce job, le rythme de vie qu'il impose ou encore l'isolement qu'il induit, avec des collègues, l'aide à affronter cette vie. Une routine faite de labeur, de froid, d'odeur de la mort, de cadence, de monotonie, de conditions de travail proche de l'esclavagisme moderne.
Avez-vous déjà pensé aux invisibles, à ceux qui passent 8 heures par jour à décapiter ou dépecer ?
Parfois l'imagination de Joseph l'amène à décrire des scènes dignes de l'odyssée, des chimères ou de guerres. Il s'accroche au réel et s'évade par les pensées, les auteurs latins, les poètes ou encore des chanteurs du XXème. Probablement que les références littéraires ne sont pas aussi prédominantes que dans le roman initial mais le graphisme de Julien Martinière appuie les propos de Joseph Ponthus et son imagination.
Effectivement, le dessin est très graphique et personnel, un trait fin et noir se rapprochant parfois du pointillisme, une technique très personnelle, novatrice, unique que je n'avais jamais vue auparavant, ce qui attire inévitablement, à la vue de la couverture.
J'ai aimé le paradoxe entre le noir et blanc de l'album qui tranche avec les couleurs qui ont une grande place à la lecture, tel que le rouge sang !
Le graphisme des visages m'a parfois semblé « déshumanisé » ou « peu visible », ce qui enrichit cette idée de dépersonnalisation, de l'esprit qui quitte l’enveloppe corporelle dans cette aliénation au travail.
Julien Martinière nous donne envie de jeter un œil l’œuvre de J.Ponthus. Sans se contenter d'imager, il appuie, complète et agrémente à merveille.
Par Maude, le 27 janvier 2025
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