ALTERNATIVE (L')
Tome 1

Pour son premier récit, Edouard Chevais-Deighton choisit un mode original. Il propose, en effet, de raconter l’histoire d’un même personnage, Pierre Hemmer, en deux albums. Dans l’un, il va rester en France et devenir un héros de la Résistance. Dans l’autre, il quittera la France avec son père et deviendra, quelques années plus tard, un cruel officier SS.

Deux livres donc, qui peuvent se lire indépendamment, mais qui trouvent tout leur sens ensemble. L’auteur raconte ainsi, à partir d’un point de départ identique, deux destins totalement opposés.

A lire ces bandes dessinées, on peut en conclure que la bonté ou la cruauté sont potentiellement en chacun d’entre-nous. L’une ou l’autre s’épanouira en fonction de nos rencontres, de la chance, de la malchance ou de notre éducation. A noter que cette dernière ne sera assurée, à l’adolescence de Pierre, ni par son père, ni par sa mère, symbolisant d’une certaine façon l’importance que peut avoir l’influence extérieur sur notre personnalité.

Chevais-Deighton, malgré son “exposé”, sème aussi le doute chez le lecteur à la fin du livre. A vie différentes, il pourrait finalement y avoir un destin commun ? Le scénariste nous joue ainsi un tour et laisse les certitudes sur le bord du chemin.

Globalement, le premier tome est assez plaisant à lire. Il raconte le parcours de Pierre depuis son enfance jusqu’à sa mission dans la ville de Paris occupée. Les premières pages sont lourdes de tension dramatique, montrant un père et un fils victimes de la haine des autres, ce qui paraît fort vraisemblable au regard du contexte. Nous découvrons ensuite les combats entre l’armée française et l’armée allemande puis les coulisses de la Résistance.

L’ensemble est très réaliste et donc intéressant pour revivre certains aspects de l’époque. Le livre, de plus, est servi par de très beaux dessins, fruits du travail d’Agosto (un autre dessinateur se chargeant du tome 2). Le graphisme est raffiné et la mise en couleur superbe.

Pour autant, cet album a aussi ses points faibles. Le plus important, pour moi, concerne le scénario, qui s’efforce d’embrasser une période très large en seulement 54 pages. Dès lors, il est difficile de garder un rythme de lecture entraînant. Certes, on ne s’ennuie pas. Tout défile rapidement, l’auteur ayant choisit de montrer certains épisodes clés de la vie de Pierre. Cette formule a aussi ses inconvénients. Nous n’avons pas toujours le temps de nous imprégner de l’ambiance ou du contexte car tout se passe trop vite. C’est fort dommage car cela aurait donné au livre une plus grande envergure.

Mais, puisque tout ceci cache aussi un exercice de style, partons de suite vers le tome 2, paru en même temps que le 1 (c’est tout l’intérêt de la chose). Nous versons ainsi comment le scénariste va jouer de ce deuxième destin et tenter de surprendre le lecteur.

Par Legoffe, le 6 décembre 2009