Carnet de tournage

Voilà le timide Roman en route pour une villa dans le sud où doit se tourner le film.
Rôle habillé, bien sûr, Roman intervient comme acteur dans les scènes de comédie et non pas comme hardeur.
Parfaitement admis et intégré par les acteurs et actrices du film de John B Root qui, lassé des pornos gonzos sans scénarios ni histoire, a décidé de réaliser un porno polar où un inspecteur enquête sur le meurtre d’une stripteaseuse et se retrouve confronté à toute une galerie de personnages aussi étranges les uns que les autres.

Explicite est un carnet de notes sur les coulisses du film Mangez-Moi !, c’est une porte entrouverte sur un monde souvent phantasmé, sur des acteurs et actrices qui alimentent un imaginaire charnel et souvent trivial.
Légèrement, Olivier Milhaud, scénariste, candide de l’histoire et spectateur discret nous restitue l’ambiance durant la semaine de tournage, les relations entre les acteurs, leur motivations et leur mal-être parfois.
L’ambiance sur le tournage est détendue, peut-être un peu faussement sympathique car les réflexions fusent, les sensibilités parfois à fleur de peau entrainent quelques pétages de plomb liés à la personnalité des acteurs et à la promiscuité du tournage, vite résorbés par le metteur en scène.
Mais le plaisir de tourner est là et, même si l’argent est la motivation essentielle des acteurs," on ne fait pas ce métier si on n’aime pas le cul" déclare une des actrices.
D’ailleurs si les acteurs sont là pour le tournage de Mangez moi, lorsqu’ils ne sont pas devant la caméra de John, ils font du gonzo, petites scènes hard sans scénario aucun, filmées en gros plan en caméra subjective, une façon de d’augmenter leurs revenus.

C’est écrit avec beaucoup de sensibilité et de tact, loin de tout voyeurisme,
jamais vulgaire, souvent drôle et toujours très soucieux de respecter les acteurs.

Explicite n’est pas une enquête ou un reportage sur le monde de la pornographie, il convient de ne pas s’arrêter à la vision un peu lissée et restreinte de ce monde, Olivier Milhaud en averti d’ailleurs le lecteur au détour de conversations ou de réflexions d’acteurs.
Tout est loin d’être rose dans ce milieu et la direction de John B Root est loin d’être la plus répandue, loin du sordide et d’une certaine forme de violence.

Le dessin de Clément C. Fabre et sa mise en couleur directe à l’aquarelle apportent à l’ensemble du récit une douceur et une distanciation qui gomme toute vulgarité pour mettre en avant des personnages pittoresque et des dialogues savoureux.

124 pages ou on ne boude pas son plaisir, avec peut-être la promesse d’un à suivre …

Par Olivier, le 23 février 2015