Chumbo

Oswaldo Wallace est furieux. Le travail dans sa mine risque d’être à l’arrêt à cause d’un agitateur, Rebendoleng, qui appelle à la grève. En cette année 1937, au Brésil, les revendications sociales ou salariales passent, aux yeux des grands patrons, comme de l’activisme communisme. 

Wallace décide de faire appel au bureau des fascistes de l’Action Intégraliste Brésilienne de sa ville, Belo Horizonte. Il souhaite qu’ils donnent une bonne leçon à Rebendoleng. Il emmène même ses deux fils, Severino et Ramires, pour qu’ils assistent à la scène.

C’est le début d’une longue histoire, pleine d’antagonismes, entre ces deux familles au fil des 70 ans qui vont suivre.

Par legoffe, le 20 août 2023

Notre avis sur Chumbo

L’auteur, entre autres, de La Favorite, se lance dans un récit fleuve de plus de 350 pages qui relate la vie d’une famille de notables de Belo Horizonte. A travers eux, c’est l’Histoire moderne du Brésil qui s’écrit également. 

Matthias Lehmann, Français par son père, Brésilien par sa mère, s’est attaché à intégrer au scénario les moments clé de ce pays d’Amérique Latine, notamment en matière de politique. On retrouve ainsi, entrecoupant les chapitres, des reproductions d’articles de journaux, de dessins satiriques, voire de publicités de l’époque. 

La saga, dont les frères Severino et Ramires restent les principales têtes d’affiche, montre gloire et déchéance d’une famille aisée, mais aussi l’évolution de la société brésilienne du fait des décisions politiques qui vont mener à l’instauration d’une dictature, sur fond d’activisme fasciste. Un aspect qui nous éclaire, d’ailleurs, sur les choix actuels de ses électeurs, tiraillés entre extrême gauche et extrême droite.

Matthias Lehmann raconte, ainsi, 70 ans de la vie du pays sous le prisme des Wallace et de la « petite » ville de Belo Horizonte (sans oublier de nombreuses escapades dans des contrées plus sauvages).

Cette démarche impressionnante lui tenait à coeur « pour conserver une relation personnelle avec le Brésil. » Personnelle et intime, car l’auteur n’hésite pas à dessiner des scènes d’ordre sexuel et, parfois, des moments de violence. Il le fait sans tabou, mais jamais il ne tombe dans la provocation. Ses dessins en noir et blanc ont quelque chose de brut qui retranscrit bien toute la dureté de ce pays, mais aussi les moments de plaisir qu’il faut savoir saisir quand ils daignent se présenter.

Un roman graphique fleuve qui ne laisse pas indifférent. L’être humain est, ici, confronté à ses plus sombres travers. Pourtant, et c’est peut-être l’élément le plus frappant du livre, la vie toujours parvient à tracer son chemin, entre espoir… et fatalité.

Par Legoffe, le 20 août 2023

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