CORTO MALTESE
Equatoria

Venise en 1911. Corto Maltese est en compagnie d’une journaliste du National Geographic, Aïda Treat, qui souhaite faire un article sur lui. Mais Corto a d’autres choses en tête, il est en quête du "Miroir du Prêtre Jean". Lors de son voyage vers Alexandrie, il fait la connaissance d’une belle allemande d’origine somalienne, Ferida Schnitzer, accompagnée de sœur Lise. En Egypte, il sauve Aïda et du même coup, un certain Winston Churchill, d’un attentat perpétré par des nationalistes. Après ces évènements, il embarque sur le bateau d’ Henry de Monfreid pour Zanzibar ou il espère y trouver une piste solide, mais le destin le ramène sur la route de Ferida, en Afrique équatoriale, à la recherche du père de celle-ci, un explorateur allemand disparu vingt ans plus tôt…

Par berthold, le 5 octobre 2017

Notre avis sur CORTO MALTESE #14 – Equatoria

Venise.
C’est dans cette ville chère à Hugo Pratt que débute cette nouvelle aventure de Corto Maltese, la seconde écrite et illustrée par Juan Diaz Canales et Ruben Pellejero. Cela commence par une scène un peu surréaliste où nous voyons des carabiniers tirer sur une girafe qui fuit devant l’une des plus fameuses places de la cité des Doges.

Juan Dias Canales nous invite à suivre le célèbre marin, créé il y a cinquante ans par Hugo Pratt dans La Ballade de la Mer salée.
Le scénariste nous invite au voyage. Venise, Alexandrie, Zanzibar, Equatoria… Que de lieux exotiques dont les noms suffisent à nous faire rêver, à nous transporter ailleurs. Nous suivons le héros à la recherche du ‘Miroir du Prêtre" ou il croiser trois femmes.

Il y a tout d’abord Aïda (inspirée par Ida Treat), une journaliste qui essaie d’écrire des articles pour le National Geaographic. C’est une femme intéressante, une pionnière qui tente de bousculer les codes selon lesquelles les femmes ne peuvent exercer certains métiers réservés aux hommes. Elle doit faire face aussi aux règlements qui interdisent aux femmes de se trouver dans certains endroits exclusivement réservés aux hommes. D’ailleurs, la scène sur le bateau, où Aïda et Corto jouent aux cartes et sont interpelés par deux hommes est un des grands moments de ce livre. Elle rêve d’un article sur le marin, mais ce dernier ne "voit aucun intérêt à devenir une aventurier de papier !". Qu’importe, elle se rattrape s’entretenant avec Winston Churchill, un type qui n’a aucun avenir en politique, d’après elle et elle pourra aussi écrire un papier sur Henry de Monfreid, l’écrivain contrebandier.
Puis, Corto rencontre Ferida Schnitzer, la fille métisse d’Emin Pasha, qui est à l’origine du voyage à Equatoria, où elle espère trouver la piste de son père. Ferida est une belle femme qui trouble le marin.
Et enfin, il y a Afra, cette femme que Corto aide et qui le suit tout du long sans dire un mot. Excepté à la fin. Ce personnage est d’ailleurs très intéressant. Elle est celle qui est en quête de son identité, qui veut retourner chez elle.

Toutes ces femmes troublent Corto, mais il n’en laisse rien paraitre, extérieurement. Nous voyons quand même qu’il y a quelque sous-entendus et moments manqués. La scène où Aïda lui dit qu’elle poursuit le voyage avec de Monfreid alors que lui, poursuit sa quête de son côté et qu’il y a cette petite larme sur la joue de la jeune femme, est un des plus beaux moments de l’album.

"Mais, il n’y a pas que les femmes dans la vie, Corto !"
Il y a l’aventure, aussi.
Et de ce côté là, nous sommes gatés.
Equatoria ne déçoit pas. Nous sommes bel et bien entrainés dans la grande aventure. Nous y trouvons les bons ingrédients : Corto joue pas mal des poings ici, dangers, mystères, des méchants, etc… Mais là où le scénariste fait fort, c’est le fait de nous raconter la première rencontre entre Corto Maltese et le lieutenant Tenton, du King’s African Rifles. Ce personnage que nous avions déjà vu dans Ann de la Jungle, dans une autre aventure de Corto (Les Ethiopiques) ou encore dans les Scorpions du Désert. Ici, le lieutenant n’est pas au mieux de sa forme, mais arrive à s’affirmer malgré sa maladie. Ce scénario imaginé par l’auteur de Blacksad nous prouve qu’il est un digne héritier de Pratt.

Quand à Ruben Pellejero, son travail en noir et blanc est vraiment magnifique. Il ne dessine pas comme Hugo Pratt, il s’en inspire et en fait ressortir l’essentiel. Il a su allier son talent au style Pratt, pour nous prouver qu’il était lui aussi digne de reprendre le personnage. Il y a ces femmes, magnifiques, ces paysages superbes, embellis par le noir et blanc. Et puis, il y a la présence du marin qui en impose. Pellejero n’en fait pas trop, il place le héros, joue avec les ombres, avec les regards, les postures pour bien faire ressortir le charisme du marin aventurier. C’est du grand art, tout simplement.

Equatoria prouve que le duo espagnol est à la hauteur pour redonner vie aux aventures de Corto Maltese.
Une grande aventure, dans la tradition d’Hugo Pratt, qui enchantera les amateurs, les puristes et tout simplement, les lecteurs de très bons romans graphiques, pardon, de bandes dessinées.

Par BERTHOLD, le 5 octobre 2017

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