COURTNEY CRUMRIN
La ligue des gentlemen ordinaires

Il aura fallu cinq ans pour découvrir la suite de ce “hors série” consacré à l’arrière grand oncle de Courtney Crumrin. Ah, que ce fut long ! Ceux qui ne connaissent pas la saga Crumrin ne peuvent me comprendre. Mais tous les autres hocheront la tête en lisant ces lignes. C’est TROP LONG ! L’auteur nous aurait il jeté un sort lui aussi ? L’hypnose et la magie auraient ils cours chez les éditeurs de Ted Naifeh ? La question est posée tant cette série apparaît comme une référence dans le monde pourtant vaste de la bande dessinée.

Certes, Naifeh nous avait offert un nouvel épisode de Courtney en octobre 2008, mais, globalement, tous les fans s’accorderont certainement à dire que ça ne suffit pas à satisfaire notre curiosité et notre gourmandise pour les choses de la nuit et du brouillard. L’auteur a un talent de conteur comme on en rencontre peu dans le milieu de la BD.

Ce nouvel épisode nous ramène dans la jeunesse d’Aloysius. Il clôt, en quelque sorte, l’histoire tragique de cet homme et plus précisément la profonde blessure qu’il porte au coeur. La cicatrice porte le doux nom d’Alice, entrée dans un pays de merveilles et de démons qui pourrait bien avoir raison de leur amour. Impossible rencontre entre deux êtres nés dans des univers que tout oppose ? Si les deux personnages portent largement le récit, la passion de l’être n’est pas le seul thème abordé ici. L’autre passion dévoreuse de raison chez les hommes occupe une grande place dans l’aventure. Elle se nomme le pouvoir.

Si le récit est peut être moins fouillé que les précédents, il reste de très bonne facture et, surtout, il permet de reconstituer quelques pierres supplémentaires du passé troublé d’Aloysius. Une manière de mieux comprendre sa personnalité ténébreuse et sa mélancolie dans la série principale.

Et si la magie de Naifeh est de raconter d’incroyables histoires, il a aussi un sacré coup de baguette pour dessiner ses univers mystiques. Il a un style si particulier, d’une noirceur tranchée… Comment ne pas être saisis par les regards des personnages et tomber ainsi en hypnose, prêts à se ruer sur tout nouvel album de l’auteur ? Ah, mais voilà, j’ai percé au grand jour le secret de Naifeh ! C’est par le regard de ses personnages qu’il transmet sa magie et qu’il nous envoûte. Ne croyez pas, alors, que je vais fermer les yeux. Non, non, je vais fixer encore mieux ces regards et me relire, et pourquoi pas, l’intégrale de la série qui est un de mes plus précieux ouvrages de la bibliothèque ! J’y retourne !

Par Legoffe, le 12 mars 2011