De briques & de sang

En octobre 1936, alors qu’elle est venue au chevet son père pour l’accompagner jusqu’à ses derniers instants, Ada Volsheim ne s’empêcher d’évoquer, dans la lettre qu’elle écrit à sa confidente, les terribles souvenirs qu’éveille son retour sur les lieux de son passé.

C’était en janvier 1914, en la Familistère de Guise dans l’Ain, un crime a été commis sur la personne d’Aristide, un ouvrier fondeur au demeurant sans histoire. Victor Leblanc, journaliste à l’humanité, couvre l’évènement et fait la connaissance d’Ada. Quelques jours plus tard, un nouveau meurtre, non loin du premier est découvert, tendant à penser que l’auteur pourrait faire partie de la communauté ouvrière. Toutefois, un pauvre hère, étranger à la collectivité, est arrêté par la police mais rien n’y fait, car juste après, deux nouvelles morts suspectes sont recensées. C’est à la suite de ces évènements qu’Ada dont la curiosité a été piquée, se décide, en compagnie de Victor, de faire la lumière sur cette sinistre série de forfaits.

 

Par phibes, le 2 novembre 2010

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Notre avis sur De briques & de sang

Régis Hautière est vraiment un auteur éclectique. Après un décollage remarqué avec Romain Hugault pour Le dernier envol, il a enchaîné depuis 2005 pas moins d’une vingtaine d’albums ayant trait à une thématique des plus variées. En ce mois d’octobre, il vient gonfler sa sympathique bibliographie avec ce nouveau one-shot publié chez KSTR et mis en images par David François, aux accents de polar sur fonds d’émancipation sociale.

Dans une verve qu’il convient de saluer pour son ressenti humaniste et historique, le scénariste nous fait faire un bond en arrière de quelques décades pour nous placer dans l’ambiance douloureuse et tendue de la pré-grande guerre. C’est le système communautaire mis au point au 19ème par le créateur du fameux poêle, Jean-Baptiste Godin, qui sert subtilement de toile de fond à cette histoire on ne peut plus prenante. Fort de ce cadrage social, l’auteur met à jour sur le ton d’une confidence amicale et lourde de secret, une intrigue policière aux inflexions doucereuses et dramatiques.

Structurée en 6 chapitres à la transition bien marquée, l’enquête s’éloigne du schéma habituel inhérent à ce genre. Non, ce n’est pas un fin limier patenté qui va chercher le ou les coupables mais une union composite formée par une femme ouvrière et un journaliste de l’Humanité, assistée certes par un inspecteur de police. Tout en simplicité, l’affaire se déroule adroitement et va puiser ces fondements au plus profond d’une histoire sensible de famille jusqu’à nous amener à une conclusion amère et sans appel.

Colorisé sans excessivité, le dessin vaporeux de David François a énormément de charme. S’éloignant sensiblement du rendu de sa précédente aventure intitulée L’étrange affaire des corps sans vie, il subjugue par cette propension à mêler réalisme et créativité. En effet, il suffit pour cela de contempler son travail sur les décors pour appréhender la restitution superbe de la Familistère de "la belle époque" qui est la preuve flagrante d’une recherche documentaire copieuse. De même, ses personnages délicatement dégingandés issus de son imagination fertile sont, de par leurs gueules emmoustachées et légèrement caricaturales, un reflet humaniste bien étudié.

Une bien belle histoire aux ambiances policières et ouvrières, et basée sur une expérience sociale révolutionnaire. Un régal de lecture !

 

Par Phibes, le 2 novembre 2010

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