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Deux filles nues

Luz réalise une biographie rare. Celle d’une peinture, de sa création à sa restitution, qui raconte la montée du nazisme. Et cette histoire d’hier nous parle d’aujourd’hui.

Par krzysztof, le 4 février 2025

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Notre avis sur Deux filles nues

10 ans après avoir échappé à l'attentat du 7 janvier 2015, l'ancien caricaturiste de Charlie Hebdo, se doutait bien qu’il serait, pour ce triste anniversaire, interrogé sur la liberté d'expression aujourd’hui. Même s’il ne croque plus dans la presse écrite, hormis à quelques rares exceptions, Luz ne pouvait répondre que par le dessin.

Et quelle réponse ! Limpide et originale. « Deux filles nues », Fauve d’Or du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême 2025 devait être un témoignage historique, il est également un éclairage lumineux sur l’actualité.

Originale dans sa narration - son scénario cinématographique même pourrait-on dire. La BD n’est pas paginée, mais organisée autour d’une suite de scènes. Luz avait une idée en tête : raconter une histoire au travers l’œil d’une toile. Ayant trouvé l’inspiration, ne restait plus qu’à trouver le tableau. Admirateur de l’expressionnisme allemand, il jeta son dévolu sur l’œuvre d’Otto Mueller, éponyme de sa BD. Dès les premiers coups de pinceaux, nous ne découvrons pas la toile, mais nous devenons spectateurs de ce qu’elle voit. Le dessein est génial : raconter l’histoire et la libre expression non pas par ce que l’œuvre contient mais par ce qu’elle aperçoit du monde qui défile devant elle : la montée du nazisme et de ses horreurs. Depuis le tableau, l’auteur place son regard, comme un réalisateur sa caméra, pour montrer au second plan l’Histoire avec un grand H dont on sent qu’elle va rapidement venir bouleverser le quotidien au premier plan.

Limpide dans son message. Même s’il a déclaré ne plus vouloir dessiner Nicolas Sarkozy ou Mahomet par lassitude, Luz n’a pas renoncé à ses convictions et ses engagements, la liberté d’expression lui reste chevillé au corps. Un artiste ne doit pas rentrer dans une case (même de BD) et rester libre de son imaginaire. Le personnage d’Otto Mueller le dit : « Je ne suis pas un expressionniste, je suis un artiste libre et sans étiquette ».

Luz est bien plus qu’un caricaturiste. Il est un auteur de BD majeur.

Par Krzysztof, le 04 février 2025

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