ENFANT MAUDIT (L')
Les tondues

En plein soulèvement populaire de mai 68, Gabriel, employé d’usine, mène son petit bonhomme de chemin sans vraiment se préoccuper des évènements qui l’entourent. Lors d’une manifestation étudiante à laquelle il a été convié par son amie d’enfance Camille, il se fait arrêté par les C.R.S. Subissant un interrogatoire musclé par un gradé zélé, Gabriel se voit traité "d’enfant de boche". Pourquoi cette affirmation déshonorante et pourquoi tant de haine envers sa petite personne, comme si l’officier de police le connaissait intimement ? Pour le savoir réellement, il n’y a qu’une chose à faire : remuer le passé, aussi sombre soit-il, pour en faire remonter l’unique vérité.
 

Par phibes, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur ENFANT MAUDIT (L’) #1 – Les tondues

Le tandem payant constitué par Laurent Galandon et Arno Monin remet les couverts chez les éditions Bamboo en produisant leur nouvelle série intitulée "L’enfant maudit". Propulsés par le diptyque "L’envolée sauvage" publié chez le même éditeur, ces deux compères nous introduisent dans une quête identitaire menée par un jeune ouvrier au passé bien trouble.

Dans une spontanéité naturelle qui lui colle à la peau et que l’on peut ressentir également dans "Quand souffle le vent" paru dernièrement chez Dargaud, Laurent Galandon pose les bases d’une intrigue simple sur un fonds de révoltes soixante-huitardes. Mettant en avant un personnage plutôt effacé, sans aucune envergure visible, il en fait un élément incontournable et réalise, de fait, un récit tendre, empli de questionnements sous-jacents bien amenés et d’une portée encore insoupçonnée. Au travers de bonds dans le temps habilement insérés et au fil de la quête tortueuse de Gabriel (somme toute légitime), le scénariste divulgue les bribes d’informations qui viennent judicieusement titiller notre envie d’en savoir d’avantage et qui concourent à la découverte d’une certaine vérité, celle de des origines du jeune homme.

On ne pourra se détacher de Gabriel et de ses péripéties présentes et passées, qui, sans être un modèle d’exubérance, n’en est pas moins, de par cette volonté qui le guide, des plus attachants. Sa personnalité est extérieurement peu expressive mais intérieurement renferme un volcan émotionnel. Cette ambivalence se ressent parfaitement dans sa façon de penser et de réagir qui peut à la fois énerver et attirer. De même, les personnages secondaires ont leur attrait et se dévoilent à nous dans des personnalités parfois douces ou radicales.

Cette aventure serait certainement tronquée s’il n’y avait pas le superbe travail pictural d’Arno Monin. En effet, ayant déjà prouvé son talent dans "L’envolée sauvage", il vient ici le conforter voire l’améliorer. En effet, les ambiances qu’il campe, un peu à la Christophe Chabouté, repose sur des expressions formidablement explicites. Ses personnages taillés un peu à la serpe, légèrement caricaturaux, reflètent dans leur semi réalisme, là grâce à une œillade en coin, là au vu d’une tête baissée, des émotions palpables d’une intensité flagrante. Les silences qui transparaissent ça et là sont d’une éloquence perceptible et suscite un flot de sentiments bien agréables. A ce titre, il conviendra de se référer au carnet de croquis inclus dans la première édition de cet album pour appréhender les nombreuses recherches de ce dessinateur talentueux.

Excellente ouverture d’une quête aux origines inquiétantes, "L’enfant maudit" est une œuvre toute en émotion, emplie d’espoir et d’appréhension. Une fresque qui mérite un gros coup de cœur !
 

Par Phibes, le 12 mai 2009

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