FUTURS DE LIU CIXIN (LES)
Les trois lois du Monde

Après La Terre vagabonde et Pour que respire le désert, le plus célèbre romancier de science-fiction en Chine Liu Cixin voit une troisième nouvelle faire l’objet d’une adaptation en bande dessinée. Toujours sous l’égide de la Maison Delcourt, cette initiative éditoriale donne l’occasion à Zhang Xiaoyu (Crusades, L’autoroute sauvage…) de détourner l’univers de l’écrivain originel et de le développer dans une forme illustrée.

Se déclinant en un seul volet, le récit proposé a l’avantage de susciter bien des questions, surtout au départ. En effet, après quelques planches, on ne manquera de s’interroger sur le lien qu’il pourrait y avoir entre des combats galactiques destructeurs où la technologie la plus avancée est perceptible et des élèves d’une pauvre petite école de la Chine profonde gérée par un professeur charitable. C’est donc l’immense différence entre les deux thématiques qui vont pousser le lecteur à aller chercher les réponses dans les pages suivantes et découvrir ainsi, sous le couvert d’une menace humanitaire, une histoire partagée entre la froideur de sélectionneurs de mondes et la chaleur dispensée par un enseignant défenseur de la culture, entre l’infiniment grand et l’infiniment petit.

Basculant remarquablement entre ces deux tableaux, Zhang Xiaoyu joue subtilement avec nos craintes et également avec nos sentiments. Autant la guerre galactique vient semer la terreur via la mise en balance du sort de civilisations, autant les agissements protecteurs et bienfaisants du professeur Li envers l’éducation éveillent beaucoup d’émotions et viennent également rappeler certains fondamentaux (les trois lois de Newton) de notre culture.

Il est clair que pour cette adaptation, Zhang Xiaoyu nous fait basculer dans un univers graphique particulièrement impressionnant. Tout en taquinant la démesure spatiale (les visions de combats galactiques sont époustouflantes), il sait faire preuve d’humanité en mettant en scène des personnages issus de la ruralité, certes pauvres mais volontaires, ô combien attachants dans leurs expressions. Son talent de dessinateur qui se décline superbement dans les planches, de la plus petite vignette au triptyque, est superbement mis en lumière par le travail richement coloré de Pan Zhiming.

Une nouvelle adaptation totalement réussie qui donne envie de se plonger dans la nouvelle originelle de Liu Cixin.

Par Phibes, le 2 mai 2022