GRANDE EVASION (LA)
La ballade de Tilman Razine
En décembre 1942, durant le siège de Leningrad, les prisonniers du Goulag ont terminé la construction de la voie ferrée sur le lac Ladoga, permettant ainsi le ravitaillement de la ville. Maintenant inutiles, ils attendent sans aucun espoir la mort. L’un d’eux décide alors de laisser une trace de son passage en gravant son nom sur l’un des murs garnis de la prison. C’est alors qu’il fait une surprenante découverte. Juste à côté de son inscription, est gravé le nom de Tilman Razine. Ce nom fait immédiatement réagir certains zeks dont Eugène Denissovitch qui, pour contenter les ignorants, décide de narrer l’histoire de ce personnage ô combien illustre et symbolique pour les victimes du Goulag. Elle commence en mars 1900, sur les rives du lac Baïkal, au moment où Eugène a été incarcéré pour participer avec nombre de ses compatriotes à la finalisation de la nouvelle voie ferrée qui doit traverser toute la Russie, le transsibérien. Profitant du voyage inaugural et au nom de ses camarades bagnards, le mystérieux Tilman Razine a décidé de menacer le gouverneur local en exigeant la libération de ses pairs ayant œuvré au transsibérien sous peine de les libérer lui-même. Intox ou réalité, les autorités vont devoir compenser avec cette menace qui risque d’enflammer les foules.
Par phibes, le 17 juillet 2014
-
Scénariste :
-
dessinateur :
-
Coloriste :
-
Éditeur :
-
Collection s :
-
-
Sortie :
-
ISBN :
9782756033679
Notre avis sur GRANDE EVASION (LA) #8 – La ballade de Tilman Razine
Prévu à l’origine de cette série concept, ce huitième tome vient en quelque sorte clôturer (provisoirement peut-être) l’échéancier originel mettant en avant des récits indépendants les uns des autres multi temporels d’évasions spectaculaires. Pour l’occasion, c’est Kris, l’artiste multi sensibilité (Les brigades du temps, Notre Mère la guerre, Svoboda, Le monde de Lucie…), qui s’attèle à la délicate tâche de réaliser un nouveau scénario correspondant à la thématique imposée.
Avec La ballade de Tilman Razine, l’on revient dans des dispositions beaucoup plus historiques que précédemment, à l’instar des tomes antérieurs (n° 1, 5 et 6). C’est la Russie du début du 20ème siècle qui nous est contée, une Russie qui s’est lancée dans un projet d’envergure qui relie l’est à l’ouest via une voie ferrée au long cours. Mais c’est aussi l’histoire imaginaire d’un homme, qui, de par son aura mystérieuse et la stratégie qui l’accompagne, va peser de tout son poids pour devenir un symbole de lutte sociale.
Cet opus, qui se décline sur deux époques, a le don de captiver par le mystère qu’il draine. En effet, si l’on parle de Tilman Razine, on ne sait nullement à quoi il ressemble. Aussi, grâce à la narration d’Eugène, le lecteur est appelé à l’identifier et ce, au travers d’une opération d’évasion particulièrement éprouvante et intrigante. A ce titre, Kris ne ménage pas la curiosité de son lectorat en faisant planer un mystère entier non seulement sur son héros mais aussi sur de nombreux autres personnages dont les rôles ne manqueront pas d’être explicités. Il en ressort donc une ballade assurément frigorifiante, particulièrement bien construite, historiquement bien calée et bardée de bonnes surprises qui confèrent à l’ensemble un niveau de qualité supérieur à la moyenne de toute la série.
L’histoire de Tilman Razine prend, grâce au travail graphique de Guillaume Martinez (Le monde de Lucie), un souffle réaliste qui n’est pas pour déplaire. Son trait plutôt classique a le don toutefois de rendre les péripéties des plus plausibles. Il ne fait aucun doute, qu’à ce sujet, le dessinateur s’est largement appuyé sur les photos et gravures de l’époque, à la faveur d’une restitution historique qui se veut cohérente. Décors et personnages se suffisent donc à eux-mêmes pour camper les ambiances les plus rafraîchissantes, les plus démunies, et porter l’intrigue dans des retranchements entreprenants.
Une histoire complète d’évasion à la symbolique bien gérée que tout un chacun pourra apprécier pour sa sensibilité et son efficacité.
Par Phibes, le 17 juillet 2014