HILD - Les femmes des Nibelungen

Au sein du royaume des Burgondes, en la bourgade de Weltz, la jeune princesse Kriemhild se veut des plus hardies. Obligée en tant que fille de sang royal à accueillir, contrairement à ses frères, tous les hôtes de marque, elle espère se détourner de toutes ses règles protocolaires injustes qui lui sont imposées et qui l’empêcheraient de devenir une reine à part entière. Le jour où son père Dankwart décède, Kriemhild se voit écartée de sa part d’héritage tant qu’elle ne sera pas mariée à un homme de sang royal qui pourra renforcer la puissance de la Burgondie. Quelques mois plus tard, elle reçoit la visite du prince Siegfried, roi des Nibelungen, qui, lors de l’invasion des armées saxonnes, offre son armée pour engager le combat. Contre l’avis de son conseiller Hagen, le roi Gunther, frère de Kriemhild, se lance dans la bataille. Le succès de cette dernière lui donne des ailes et projette, au grand dam d’Hagen, de prendre pour épouse la reine Brunehilde d’Yslande, une femme très autoritaire et insoumise qui gère par la force et le sang son royaume. Avec l’assentiment de Kriemhild, Siegfried offre son aide à Gunther pour aller la conquérir. Auront-ils gain de cause face à la femme-homme ? Et si c’était le cas, ne serait-ce pas un malheureux tournant dans sa destinée de femme libre ?

Par phibes, le 25 février 2025

Notre avis sur HILD – Les femmes des Nibelungen

Après son roman graphique Black paradise chez l’éditeur néerlandais SU Strips, la jeune autrice belge Veerle Hildebrandt revient pour la deuxième fois sous les feux des projecteurs afin de nous présenter sa dernière production sous l’égide des éditions Anspach. Cette fois-ci, elle prend pour parti d’adapter la fameuse épopée issue de la mythologie germanique sur la légende des Nibelungen.

Plutôt que de narrer les exploits du roi Siegfried contre le dragon et la récupération par celui-ci du trésor des Nibelungen, elle s’est donnée pour mission de narrer la suite de cette légende par le truchement des deux protagonistes féminins que sont Kriemhild et Brunehilde. Devenant ainsi les personnages principaux de cette adaptation, elles nous offrent une vision des rôles ô combien contraints (par leurs homologues masculins) de ces femmes d’époque qui se trouvaient au plus haut rang de la hiérarchie royale.

Nul doute que Veerle Hildebrandt marque subtilement les esprits en présentant deux femmes au caractère trempé, en avance sur leur temps, prônant une liberté et une indépendance on ne peut plus ardu à gagner. Le récit démontre implicitement que Kriemhild et Brunehilde vivent dans un monde d’hommes qui peuvent trahir (Hagen) et qu’elles se doivent de se plier aux exigences de ces derniers.

On saluera le mode de traitement de cette fresque médiévale dramatique, empreinte d’une réelle pétulance dans l’utilisation des dialogues et des actions menées. L’artiste reste maître de son récit en faisant abstraction d’une part de la chanson des Nibelungen et en jouant sur l’essentiel de celle-ci avec une réelle envie d’originalité.

Graphiquement, on a le même ressenti. Veerle Hildebrandt joue la carte d’un trait libéré, sans aucune contrainte artistique si ce n’est de respecter un temps soit peu l’époque médiévale. Là aussi, le contemporain prend le dessus sur le classique. A la faveur d’un coup de crayon stylisé et une colorisation informatisée, cette évocation nous immerge dans un réel rafraichissement ambiant qui a le privilège de se mettre efficacement en retrait d’autres adaptations historiques sur le même sujet.

Une généreuse adaptation de la célèbre épopée germanique des Nibelungen empreinte de féminisme et de modernité volontaire.

Par Phibes, le 25 février 2025

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