IL M'A VOLE MA VIE

Alors que tout pourrait paraître normal en ce jour d’hiver, Morgane se voit houspillée sévèrement par son concubin Yassine qui lui reproche des faits totalement inventés par ce dernier. Alors qu’elle passe l’aspirateur par convenance pour son homme, celui-ci la menace de la « défoncer » plus tard. Le repas qu’elle lui sert le pousse à réagir très violemment au point de tenter de la frapper. Même si l’arrivée de Bilal leur fils parvient à tempérer les ardeurs de son père, celui-ci revient à l’assaut pour l’empêcher d’aller faire les courses. A l’aide d’un cache-nez, il l’étrangle. Comment Morgane en est arrivée là, à vivre dans une terreur permanente perpétrée par un compagnon brutal, maniaque et sans aucune empathie ? il suffit de plonger dans le passé de la jeune femme martyrisée, six ans plus tôt, au moment où cette dernière s’apprête à quitter son compagnon de l’époque, Franck…

Par phibes, le 4 janvier 2024

Notre avis sur IL M’A VOLE MA VIE

Laurent-Frédéric Bollée s’empare d’un lourd sujet on ne peut plus d’actualité via le témoignage poignant de Morgane Seliman en 2015 sur les violences conjugales qu’elle a personnellement vécues. Cette adaptation illustrée donne l’occasion au scénariste de nous sensibiliser sur ce terrible fait de société qui alimente douloureusement et continuellement notre quotidien.

Il ne fait aucun doute que le récit reprend fidèlement l’œuvre de Morgane Seliman et à la faveur d’une entrée en matière d’une violence affligeante, nous place immédiatement dans ce contexte dramatique dans lequel elle a baigné durement. Ce n’est qu’à la suite de ce départ bouleversant que le parcours de la persécutée nous est dévoilé. Celui-ci démarre certes sur une rupture mais reste dans des proportions acceptables jusqu’à sa rencontre avec Yassine, un homme assurément un peu envahissant mais direct et plutôt protecteur. C’est après avoir décidé de partager leur vie que le calvaire de Morgane commence et n’en finit pas de s’amplifier au rythme de brimades, de coups de plus en plus violents. La spirale dans laquelle s’installe la jeune femme semble sans fin et flirte avec l’ignominie. Jusqu’à ce qu’enfin, elle fasse la démarche qui pourrait la sortir de cette persécution. Mais là encore, le chemin est encore long et loin d’être évident.

Cet album demeure réellement atterrant tant le relationnel du couple atteint des extrémités glaçantes. La violence qui jaillit de chaque page suscite des élans émotionnels et soulève une réelle amertume au regard de la fausseté, de l’intolérance et de l’imprévisibilité de Yassine véritablement ahurissantes. Morgane apparait comme une éponge et absorbe tant bien que mal ce qu’elle subit. A la fois fragile et résistante, elle fait impression et son combat contre son compagnon semble disproportionné. Même quand elle parvient enfin à entrevoir le bout du tunnel, sa quête de justice prend du plomb dans l’aile et soulève une réelle amertume.

Ce témoignage bouleversant passe par la mise en images de Francesco Dibattista qui se voit, pour la première fois, publié en France. Le travail qu’il produit se veut stylé et suffisamment explicite pour visualiser les tourments de Morgane. Le découpage est assez conventionnel mais la rigueur du trait et le soin apporté à l’expressivité des personnages se veulent un gage de qualité pour cette adaptation.

Un récit puissant sur les violences faites aux femmes qui a la spécificité d’être excessivement touchant, révoltant et on ne peut plus sensibilisateur.

Par Phibes, le 4 janvier 2024

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