ÎLE AU POULAILLER (L')
Tome 2

Suite et fin de cette splendide aventure que nous a mitonnée Laureline Mattiussi. Toute l’histoire se recentre sur l’île au poulailler où tous les protagonistes vont se retrouver.
Gouvernée par le père de cette terrible flibustière dont le langage fleuri est à la hauteur des actes, pirate reconverti dans l’élevage de poulet et accessoirement dans le recel pour de riches commanditaires d’iles voisines.
Le trône d’or dérobé continue de susciter les convoitises, et chacun se demande où il se trouve, a-t-il été livré à son commanditaire, est il encore aux mains du recéleur, et accessoirement, qui est digne de commander cette troupe de forbans ?
Action, introspection, scènes de sexe torride, les pirates de Laureline sont dans une dynamique où le désespoir et l’absence de futur les entrainent vers une fin inattendue. La mort et l’amour seront au bout de l’aventure.
Onirisme et fantastique sont omni présents dans ce deuxième opus où la frontière entre le réel et l’hallucinatoire deviens ténue. L’atmosphère oppressante de l’ile, les rapports que les boucaniers entretiennent entre eux, tout concours à ce que la raison bascule et à ce que le lecteur lui-même ne sache plus distinguer le vrai du mirage qui ne se dissipera qu’à la levée du jour.
Ces pirates qui veulent vivre libres, loin de toute règle établie, ne trouvent malgré tout pas leur bonheur, leur vie reste désespérément vide, futile et superficielle. Tout ce coté sombre et miséreux de leur existence sans attache ni amour est magnifiquement emballé et emporté dans une déferlante d’images et de couleurs, bravo à Isabelle Merlet.
Le dessin, qui sait si bien s’adapter au rythme de l’histoire, calme et reposé dans les monologues, explose dans une fluidité puissante dès lors que les acteurs laissent leurs sentiments prendre le dessus.
Malgré cette détresse ressentie, l’album reste joyeux, vif et clair avec une lecture limpide où des planches sans texte offrent un dessin tellement explicite qu’il se suffit à lui-même pour nous faire partager l’émotion et les sentiments des protagonistes.
Lorsque les forbans se laissent aller à discourir, l’écriture de Laureline Mattiussi se fait subtile et baroque Le verbe peut se faire délicat comme une poésie, où les mots coulent, clairs et précieux, avant d’éclater en un feu d’artifice de jurons. La trivialité du langage de ces pirates où notre diablesse excelle est tout à fait réjouissante et sensuelle et exprime tout crument les sentiments des acteurs. On s’insulte, on se tape dessus et on s’aime, dans tous les sens…

Lauréate du prix Artémisia, Laureline Mattiussi confirme son talent avec ce deuxième et dernier volet de son Ile au poulailler.

Par Olivier, le 5 août 2010