Intempérie

Adaptation du roman "Intempérie" de Jesús Carrasco, élu meilleur roman de langue espagnole en 2013, cet album nous permet de retrouver le talentueux auteur d’Un maillot pour l’Algérie, Javi Rey, cette fois dans un registre bien plus sobre, tout en subtilité.

Il nous propose de suivre un jeune garçon qui prend la plus grande décision de sa vie, celle de fuir une bonne fois pour toute la violence de son quotidien, ces infamies qu’on lui fait subir sans que son lâche de père ne daigne lui venir en aide.
Le portrait que brosse devant nous Javi Rey est extrêmement touchant dès les premières cases ou l’on croise le jeune protagoniste qui se retrouve à affronter l’âpre réalité de ce pays sec, grillé par le soleil. Le scénario est du même acabit, rêche et centré sur les regards et les silences. On ne découvre les tenants et aboutissants que par petites touches, sans pour autant avoir tout les détails, mais qu’importe, ils sont inutiles, car ce qui importe ce sont les sensations, les sons, l’atmosphère dans laquelle ce vieillard et ce gamin se retrouvent, ou ils évoluent en tentant en vain de fuir ceux qui vont immanquablement finir par se pointer…

Plus on s’immerge dans ces pages, plus il devient plus qu’évident que nous en sortirons marqués par cet étrange road-movie tendu et presque désespéré. On a envie de découvrir le livre de Carrasco, dans la foulée, de glisser dans ses mots en devinant que l’adaptation de Javi Rey ne retranscrit certainement qu’une partie du style de l’écrivain ! On a presque l’impression de se retrouver dans du Carver, un style bref et efficace. Et de ce point de vue cet album demeure un "Roman Graphique" dans le vrai sens noble du terme…

Mais au delà du style impeccable, il faut souligner, une nouvelle fois l’incroyable beauté du trait de Rey. Aucun effet de style gratuit, des cadrages particulièrement étudiés et sans chichis ni effet de manche. C’est beau, même magnifique, c’est sobre et sans concession, à l’image de ce paysage qu’on devine caniculaire, ne serait-ce que dans le choix des couleurs, des partis prit graphiques.

Une très grande leçon de bande dessinée qui donne envie d’en voir davantage. Vivement votre prochain album, Javi Rey !

Très conseillé, bien sur !

Par FredGri, le 31 juillet 2017