JUGE BAO
Les larmes du Bouddha

Presque deux ans d’attente après le second volume, de quoi faire tomber une série dans l’oubli. Néanmoins cette attente aura réellement valu le coup, car nous retrouvons les deux auteurs particulièrement en forme dans ce qui se présente comme la première partie d’un diptyque qui devrait se conclure avec le sixième et dernier volume de la série !

On replonge donc très facilement dans cette ambiance polar matinée de leçons d’histoire, de regard sur les traditions chinoises. Le juge Bao et ses fidèles compagnons se retrouvent ainsi "piégés" dans un monastère, loin de tout, tandis qu’une tempête de neige se déclare et qu’un complot se déclenche contre eux ! Le scénariste trouble le jeu en rajoutant une histoire de fantôme, puis une statue de Bouddha qui pleure alors que des émeraudes apparaissent de temps à autres, mystérieusement, au creux de la main de pierre que tend la statue !

On s’éloigne quelque peu de l’habituel canevas de la série. Ici, le juge Bao n’a pas pour mission de dénoncer une quelconque malversation, de porter un jugement et de tracer sa route jusqu’à la prochaine affaire, non, il doit avant tout se protéger et essayer de percer les secrets qui l’entourent ! Et comme cette histoire se continue dans le prochain volume on n’a pas non plus toute la résolution ! Mais ce qui marque cette lecture c’est la montée en puissance du danger et du sentiment que les ombres de ce monastère cachent bien des mystères, que tout n’est pas dit. On a pour la première fois l’impression que le juge et ses hommes sont quelque peu dépassés par la situation. C’est très intéressant de revenir comme ça sur le statut du personnage !

Le scénario de Patrick Marty continue d’être vraiment habile et captivant. Mine de rien, sous les dehors d’une vague enquête le scénariste raconte surtout les us et coutume d’une Chine moyenâgeuse, même si ici cet aspect est bien moins appuyé que dans les précédents albums ! Il n’en demeure pas moins que cette série reste avant tout un très bon moment de lecture. Sentiment renforcé par les superbes planches de Chongrui Nie qui continue de nous éblouir avec ses jeux de cartes à gratter (il mixe cette technique avec de l’encre, du crayon et de la gouache…) ! Car c’est visuellement une très très grande réussite, avec des cases régulièrement sublimes de réalisme… Le seul bémol que j’émets c’est que cette très belle technique a aussi tendance à figer les pages, surtout quand il s’agit d’amener des combats ou des scènes plus dynamiques !

Alors le tome 6 est annoncé en fin de volume, pas de date et on en vient à espérer qu’il ne faudra pas attendre une nouvelle fois presque deux ans pour retrouver ce juge et sa troupe !

En attendant, je vous conseille très vivement cette lecture dépaysante !

Par FredGri, le 5 décembre 2013