Jusqu'à Raqqa. Un combattant français avec les Kurdes contre Daech

 
Militant dans l’âme car plein de convictions, le Français André Hébert (c’est un pseudo) a soutenu différentes causes en s’investissant de diverses façons : en publiant et en distribuant des revues, par exemple. Ou en participant à des manifestations. Mais il était convaincu que l’urgence et l’importance de certains combats demandaient à ce que les choses ne se fassent pas seulement "de loin". Envoyer de l’argent ou vendre des tee-shirts à messages, c’est bien, mais donner vraiment de sa personne, de son temps et de son énergie, voilà qui correspondait mieux à son tempérament et à sa manière de voir les choses.

Ainsi, lorsqu’il a été bouleversé par la cause kurde, André a décidé de partir pour la Syrie. Il souhaitait être à leurs côtés, parmi eux, pour les aider dans leur guerre contre Daech. Béotien total en matière de guerre, André a suivi une rapide formation puis a été affecté au fil des 9 mois qu’il a passés sur place dans différentes unités "internationalistes" qui l’ont conduit au cœur de combats terriblement violents mais aussi parfois déterminants.
 

Par sylvestre, le 10 février 2023

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Notre avis sur Jusqu’à Raqqa. Un combattant français avec les Kurdes contre Daech

 
Adaptée du livre portant le même titre, la bande dessinée Jusqu’à Raqqa, BD autobiographique, raconte le total engagement d’un Français pour une cause à laquelle il était au départ absolument étranger. Si ce genre de personne et leur démarche peuvent d’emblée susciter de la suspicion ou de l’incompréhension, c’est surtout parce qu’il est question d’engagements sur des terrains qui, pour les Occidentaux, riment avant tout avec "peuples tous coupables" (coupables des attentats terroristes). Mais là où il y a des bourreaux, il y a des victimes. Or, quand ces dernières sont innocentes, la compassion devant les horreurs qu’elles subissent peut vite se transformer en révolte et déboucher sur des volontés infiniment fortes d’aller leur porter secours. Parfois c’est suite à des catastrophes naturelles qu’on voit partir des volontaires. Parfois, c’est dans le cadre d’une aide médicale. Parfois enfin c’est quand les guerres font rage ; et, pour peu qu’on se sente le moral et la force physique… Même si l’on sait bien qu’on peut y laisser sa peau…

Le témoignage de André Hébert est à couper le souffle. Certains partent comme lui faire la guerre parce qu’ils sont mercenaires, anciens militaires en mal d’aventure ou têtes brûlées. D’autres – et c’est son cas – font ça par véritable empathie envers les peuples qu’ils viennent aider en venant grossir les rangs de leurs armées. N’empêche… Pour chacun d’eux, il y a le risque de mourir là-bas à tout instant, loin de sa famille ; ce qui nous sidère le plus, et qui est fascinant. Sont-ils complètement fous ? Ou courageux comme peu sauraient l’être ?!

André Hébert ne donne pas dans le "gros-bras", ni dans le sensationnel. Ce n’est pas un prétentieux. Dans ce qui ressemble à un carnet de bord, il parle d’ailleurs volontiers et avec simplicité de trop longues périodes pendant lesquelles il s’ennuie dans des lieux d’où l’ennemi a été chassé. Il parle des maladies qui frappent les Occidentaux comme lui, dont les systèmes digestifs ne sont pas habitués à boire et à manger ce qui fait leurs repas. Il parle de la barrière de la langue, aussi, et évoque même ses insubordinations.

Il parle aussi de la chaleur insoutenable, des terribles conditions de vie, de la peur, de la difficulté des combats et de l’horreur qu’il côtoie. De la tristesse qu’il ressent pour ceux qui meurent ; fussent-ils ceux sur qui il pointait le canon de son arme…

Son témoignage n’est pas que factuel : s’il s’est engagé, c’est qu’il a pris parti. Et s’il a pris fait et cause, c’est parce qu’il s’était renseigné. Au fil des pages, il distille donc des cours d’histoire, de géographie et de politique de la région qu’il a arpentée dans ses théâtres les plus chauds : le Rojava, le Kurdistan syrien.

Pas mal de vignettes (signées Otero) semblent avoir été réalisées d’après photographies. Quoi qu’il en soit, le résultat graphique que montre cette bande dessinée est très réaliste et, à ce titre, très "flippant" dès lors que ça nous montre presque sans filtre l’expérience qu’André Hébert a vécue.

Enfin on notera cette confidence ; et on la comprendra à 200% : quand le combattant nous parle de ce point qu’il a atteint dans son engagement qui fait de lui quelqu’un pour qui la terre défendue devient son pays de coeur, quand il nous parle des montées d’adrénaline qu’il a connues, du danger qu’il a occulté pour avancer, et du plaisir indescriptible des moments de paix qui suivent pour les chanceux qui reviennent vivants des combats.

On ressort admiratifs même si les victoires remportées sont des garanties fragiles. Le témoignage d’André Hébert est très intéressant et sa mise en images le sert à merveille. Il participe à ne pas mettre "tout le monde dans le même panier", qu’il s’agisse des gens "là-bas" ou qu’il s’agisse de ceux comme lui qui partent là-bas. Ce n’est pas parce qu’on part combattre en Syrie qu’on est djihadiste. Merci André. Pour la Paix, pour l’Humanité.
 

Par Sylvestre, le 10 février 2023

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