KAMUI-DEN
Tome 1

La trame de ce premier volume se développe autour de trois personnages principaux et de toute une pléiade de personnages secondaires, en pleine période d’Edo (1603-1868).
Le premier, Kamui, fait partie des parias, ceux qui se trouvaient au plus bas de la pyramide sociale. Malgré les brimades, Kamui est exceptionnellement résistant et doté d’une volonté inflexible. Son but ultime est de devenir un ninja, ces imbattables guerriers de l’ombre.
Ensuite il y a Shôsuke, un fils de domestique, la caste juste au dessus des parias. Shôsuké veut s’émanciper pour devenir paysan indépendant et ne plus avoir à supporter les directives des fonctionnaires.
Puis, enfin il y a Ryûnoshin, le fils d’un haut fonctionnaire de fief, qui veut aller au-delà de son statut de privilégié pour devenir lui aussi un ninja…

Par fredgri, le 29 juin 2013

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Notre avis sur KAMUI-DEN #1 – Tome 1

En voyant ce premier volume (sur quatre en tout), il y a de quoi être en effet impressionné. Un premier numéro de 1500 pages, sur papier bible, ça ne laisse pas indifférent.
Néanmoins, bien au delà de ces contingences purement formelles on ne peut qu’admettre que Kamui-Den est aussi une série qui mérite très amplement d’être redécouverte, grâce aux éditions Kana qui proposent ainsi de s’immerger assez intensivement dans cette chronique sociale hors du commun.

Car, au travers de ces divers parcours, Sanpei Shirato nous raconte les conditions de vie des paysans à l’époque féodale japonaise. Il met l’accent sur la discrimination, sur l’inégalité qui frappe les uns au dépend des autres et sur cette volonté qui émerge, au travers des trois jeunes héros de s’émanciper de ce système coercitif de castes. Chacun à leur façon ils vont donc se positionner, que ce soit Kamui, le jeune paria qui n’a rien à perdre et qui veut absolument devenir ninja, afin de sortir à jamais de ces terres ou les siens se font tuer comme des chiens, que ce soit Shôsuke qui se cultive, qui apprend à lire, qui transmet ses connaissances autour de lui, afin de donner aux paysans les armes pour ne pas se laisser avoir lors du partage des impôts, tout en rêvant de devenir un paysan indépendant, de cultiver ses terres, d’être maître de son destin. Quand au dernier, Ryûnoshin, c’est l’exemple de ces familles de guerriers, riches, qui se jalousent les unes les autres et qui peuvent très bien sombrer du jour au lendemain. Au milieu du XVIIe siècle, la pyramide sociale est très hiérarchisée. Sous le joug d’une minorité de clans de samouraïs, des grands domaine de seigneurs, sous la férule des shoguns qui tiennent militairement le pays. Cette hiérarchie divise, pour mieux régner, ces paysans, producteurs de riz, de blé, de ces denrées nourricières du pays.
Ainsi ce récit qui met en scène des combats, de l’action, devient très rapidement bien plus une chronique sociale aux accents didactiques (pas mal d’explications de textes viennent ponctuer la lecture), d’inspiration marxiste, qui met en avant la lutte des classes dans un Japon féodal. Ce gekiga (manga pour adulte) entreprend ainsi de porter un regard très dur sur une certaine situation sociologique qui dérape, amenant le lecteur, dès le début, à bien réfléchir sur les parallèles qui peuvent s’opérer avec notre société moderne !

Cette œuvre a eu, depuis, un énorme impact, tant sur le monde de la bande dessinée nipponne qu’auprès de l’intelligentsia, principalement à cause des idées très révolutionnaire mettant en scène un contexte social vraiment dur et violent, sans concession !

Mais, contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce volume est avant tout passionnant à lire, car extrêmement rythmé. Certe, le cadre est vraiment tendu, beaucoup de violences assez âpres (des enfants qui se font tuer, des hommes obligés de vendre leurs filles et leurs femmes etc.), mais l’écriture est d’une très grande fluidité et on est réellement pris aux tripes par ces destinées qui se débattent devant nous !
En parallèle, Shirato adopte une narration assez morcelée, ce qui lui permet d’aborder pas mal de trames en même temps, en prenant aussi son temps, en digressant, en appuyant sur une idée, sur un personnage. Il laisse certaines intrigues en suspend pour y revenir plus tard, allant parfois nous lancer sur des fausses pistes, ou bien se laissant aller à suivre un loup blanc en affirmant 100 pages plus loin qu’il ne fera de toute façon pas vraiment partie du récit global ! Ainsi l’auteur intervient régulièrement pour des explications, pour donner son opinion, pour s’excuser de telle ou telle digression ou simplement pour expliquer pourquoi il a consacré tel chapitre à tel personnage plutôt qu’à un autre.
Il y a alors, derrière ce contexte dénonciateur, beaucoup de lucidité sur cette société, mais sur le rôle du narrateur aussi.

Kamui-Den devenant alors une œuvre très forte, en prise directe avec le monde, mais qui n’hésite pas à se rapprocher de son lectorat, qui ne le prend jamais pour un imbécile tout en ouvrant des pistes vers des débats sociaux très intenses !

Mais j’insiste, ce premier volume est avant tout captivant, les pages se succèdent sans qu’on ne s’en rende compte. On relève le nez et 200 pages viennent de passer. En contre partie, c’est vrai qu’il faut tout de même s’accrocher, car il faut arriver à bien distinguer tel seigneur, tel paysan, mais l’effort en vaut largement la chandelle !

A découvrir absolument !

Par FredGri, le 29 juin 2013

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