Kirkenes

Henrik est un jeune ado norvégien quelque peu idéaliste, il passe le Bac (ou l’équivalent norvégien), sort avec Mia et vit avec sa mère. De temps à autre il va voir son père Alf, qui a du mal à se remettre d’une grosse dépression. Mais Henrik a aussi un très bon ami, Inge, un passionné de cinéma.
Ces deux là, c’est cul et chemise, ils sont tout le temps ensemble, partagent leur vacance, parlent de tout et, à l’occasion, peuvent même se retrouver en pleine nuit pour aller… cramer une église, par exemple… sur un coup de tête… pour le fun… espérant juste que personne ne le saura… que ça ne fasse pas la une aux infos…
Mais voilà…

Par fredgri, le 17 janvier 2011

Notre avis sur Kirkenes

Au début de ces 125 pages de Bd, on se dit que ces deux silhouettes qui vont bruler une église au milieu de la nuit créent l’évènement qui va mener tout le reste du récit. Et, en fait, pas vraiment. Certes, les auteurs reviennent régulièrement sur cet acte de vandalisme, que ce soit au travers des infos ou simplement au détour d’une conversation. Néanmoins, outre que cet évènement créé la surprise dans la communauté, il n’en reste pas moins un fait divers qui n’a pas réellement d’incidence directe sur les personnages de l’album… Même si on sait que derrière ces cagoules se cachaient Henrik et Inge…
Il n’y aura pas forcément d’explication à cet acte, si ce n’est qu’ils ont été jusqu’au bout d’un défi ridicule, sous divers prétextes, histoire de dépasser les limites qu’ils se donnent. Rien ne va les empêcher, malgré tout de vivre leur petites vies normales.

Et c’est dans ces vies que nous allons entrer, progressivement, pour mieux connaître à la fois ces deux jeunes hommes, mais aussi pour soudain s’immerger dans des relations enfants/parents pas toujours très simples. "Kirkenes" nous parle quelque part d’une certaine difficulté de communiquer entre les générations, de la rupture qui peut en résulter, mais aussi de cette volonté de se trouver sa voix. Mais "Kirkenes" nous parle avant tout d’une amitié très forte, de ces deux garçons qui se rendent compte des limites de leurs idéaux, que ce soit au travers de cet incendie inutile, comme cette rencontre avec le cousin photographe… Mine de rien, c’est les première leçons, une sorte de road movie lent et introspectif.
En parallèle, on suit aussi le père d’Henrik, Alf. Un homme qui tente de remonter la pente, qui essaie de ne pas complètement sombrer dans ses fantasmes parano, qui espère encore pouvoir reconstruire un lien avec son fils, espérance qui lui donne l’énergie pour s’en sortir.

L’écriture de Jonathan Châtel est donc d’une réelle finesse, très juste. Elle permet surtout de mettre en avant sans avoir forcément besoin de le dire, des choses assez intimes, des relations ambigües (comme les rêves qu’Henrik fait qui reflètent la relation qu’il a ou qu’il souhaiterait avoir avec son père). Une autre qualité de ce récit c’est qu’il n’y a pas toutes les solutions, qu’il faut en trouver certaine par nous même et laisser aussi au récit la possibilité d’en découvrir d’autre hors champs. On n’est donc pas dans un récit classique, avec un schéma très normalisé, mais bel et bien dans un récit ouvert ou le lecteur doit accepter de le laisser partir à un moment, sans lui.

Graphiquement, on est dans une approche toute aussi intuitive, le trait est rapide, pas super précis mais vraiment très vivant et suffisamment expressif. Je ne suis pas toujours très fan de ce genre d’approche, mais néanmoins je reconnais qu’ici elle correspond complètement au récit. Donc c’est parfait !

"Kirkenes" se lit donc d’une traite, comme une sorte de voyage tranquille, posé, légèrement introspectif, avec une touche de désillusion bien dosée. De quoi commencer l’année en douceur !

Par FredGri, le 17 janvier 2011

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