L'eau et la Terre

Au lendemain de la prise de pouvoir des Khmers rouges au Cambodge le 17 avril 1975, la déportation des citadins vers les campagnes peut commencer, ainsi que la rééducation, le travail forcé, les interrogatoires, et l’extermination de tous les ennemis potentiels.
L’eau et la terre nous emmène au cœur de cette tragédie cambodgienne.

Par v-degache, le 8 mars 2023

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Notre avis sur L’eau et la Terre

Après avoir traité des derniers moments de la Guerre civile au Cambodge dans Impasse et rouge en 1995 (sceneario.com/bande-dessinee/impasse-et-rouge/impasse-et-rouge/34298.html), Phouséra Ing, aka Séra, né au Cambodge en juin 1961, poursuit l’exploration du terrible passé de son pays natal, qui a directement impacté son histoire personnelle et familiale, dans L’eau et la terre, publié initialement en 2005, et réédité et réactualisé par Delcourt.

Le récit début alors que les Khmers rouges ont pris le pouvoir en 1975. Les camarades de Pol Pot vont pouvoir débuter la déportation massive et la transformation du pays en un gigantesque camp de travail forcé, surtout au profit du développement de l’agriculture, afin de faire réaliser au Kampuchéa démocratique, à l’instar de la Chine de Mao, le « grand bond en avant prodigieux » !
Parallèlement, les interrogatoires et les massacres débutent puis s’intensifient, afin d’éliminer tout « ennemi de classe » ou « ennemi politique ». Séra va ainsi, à travers une galerie de personnages, nous emmener dans ce Cambodge placé sous le joug khmer rouge, afin de saisir la réalité de ce qui est en train de se passer, de cet « autogénocide ». Ces hommes, femmes et enfants croisés dans L’eau et la Terre tentent de se faire oublier de l’Angkar pour survivre, luttent contre la faim et la fatigue, ou bien sombrent dans la folie et se laissent mourir face à cette folie qu’est la recherche d’une race khmère « pure », passant par l’élimination de ceux qui ne sont pas « vrais ».

Déjà entrevu dans Impasse et rouge dix ans plus tôt, nous retrouvons ce réalisme quasi documentaire de Séra, tant par son dessin très photographique, mais aussi par cette volonté de systématiquement contextualiser avec précision et rigueur ce cheminement à travers un Cambodge où les Khmers rouges vident les villes, et brisent les liens entre les familles et les individus.

L’eau et la terre c’est la destruction programmée d’un peuple, mais c’est aussi une superbe bd qui fait œuvre d’histoire, et participe au devoir de mémoire.

Par V. DEGACHE, le 8 mars 2023

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