L'oeil de Boeuf

Jeune mais timide et subissant une profonde misère sexuelle, Norbert compense ses vides affectifs en observant sa voisine grâce à l’œil de bœuf. Il vit sa vie par procuration au point de la régler sur celle d’Edith, la voisine convoitée. Un jour, il est découvert ! Edith boucha le trou dans le mur. Plus d’images. La réaction désespérée du jeune homme le conduira à la violence extrême.

Par MARIE, le 1 janvier 2001

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Toute la BD, que de la BD !

Notre avis sur L’oeil de Boeuf

Si j’ai été attirée par cet album, c’est grâce à la couverture spectaculaire au trait inhabituel, structuré, avec une maquette innovante, des couleurs éclatantes, travaillées avec sensibilité.
Le format est grand, souple, à rabats avec de somptueuses illustrations qui éclairent le noir de la couche de fond. L’intérieur est égal sinon mieux que cette couverture. Les cases s’interpellent les unes les autres et s’enchaînent sans laisser le moindre répit à la lecture. On est pris dans un tourbillon graphique et coloré qui laisse perplexe devant tant d’innovation et de créativité.
Le dessin appelle la matière et la forme. Pas très loin du modelage en pâte, les compositions donnent de la profondeur et une lumière forte. L’éclairage illumine alors les verts, les oranges ou les violets, c’est dire l’extraordinaire palette que l’on trouve dans l’ouvrage. L’œil ne se lasse pas ni n’est arrêté par un obstacle.
Cet exercice d’auteur donne encore un regard supplémentaire sur le médium. On peut tout faire, on peut tout dire pourvu qu’on ait la sensibilité.
Le visuel ne suffit pas pour faire une bd, il faut aussi une histoire. Là encore, l’auteur tape fort. Il raconte l’obsession, la misère, la timidité qui, poussée à son paroxysme peut pervertir et rendre violent. Quel enfant ne pleure ou ne tape si on lui prend son jouet ? Ainsi on enlève à l’homme ce qui lui permettait de s’offrir un semblant de vie sexuelle en s’appropriant mentalement celle des autres.
Mais tel Kafka dans « La métamorphose » ou encore Marie Darieusseq dans son livre « Truismes » où une femme « cochonne » devient une truie, l’homme va devenir à l’extérieur ce qu’il est à l’intérieur et son image devenant insupportable va le ronger, jusqu’à mourir, seul caché dans un lieu fermé, sans issue, loin du regard des autres, loin du jugement des autres.
Tu es ! Tu as été !Tu seras ! Voilà pourquoi l’homme est fragile. Il est trop souvent jugé, à tort et devient souvent l’instrument de ce système. Il en mourra évidemment, isolé, incompris, salit jusqu’à ce qu’il devienne cette monstruosité.
J’ai déjà relu deux fois l’album dans la soirée, il émane de lui une attirance étonnante et c’est dans ces moments là de bonheur que je suis ravie d’aimer la bd ! Les 400 coups sont un éditeur intimiste qui mérite un coup de pouce. L’album est peu cher pour une fois (12,50€ pour un petit éditeur, ça relève de l’exploit) alors profitez en pour découvrir cette perle !

Par MARIE, le 7 février 2005

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