L'ours est un écrivain comme les autres

Arthur Bramhall regarde sa maison bruler et avec elle le manuscrit de son dernier roman, à peine terminé ! C’est un coup extrêmement dur et il se remet tant bien que mal à réécrire. Au bout de quelques mois, son nouveau texte est fini, il décide, cette fois, de le protéger en l’enterrant au pied d’un vieil épicéa. Mais, une nouvelle fois, le destin en a décidé autrement et un ours, un peu curieux, vient déterrer la mallette avec les feuillets. Dans un éclair de lucidité, l’animal se dit que tout ça pourrait lui rapporter assez pour lui permettre de s’acheter du miel… Il part dans la foulée, en direction de la ville, rencontre un éditeur et réussit, contre toute attente, à se faire éditer sous le nom de Dan Flakes. Tout de suite, c’est un succès, les journaliste s’arrachent cet étrange écrivain, un peu brut de décoffrage, qui sait à peine s’exprimer, Hollywood lui fait les yeux doux…
Et pendant ce temps, Arthur déprime…

Par fredgri, le 29 août 2019

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Notre avis sur L’ours est un écrivain comme les autres

Paru en 1996, le roman de William Kotzwinkle a tout de suite inspiré ce nouvel album de Kokor qui nous entraîne dans un univers fantasque ou un ours, un peu plus futé et opportuniste que la moyenne, se réapproprie le manuscrit d’un auteur et trouve ainsi le succès.

Cette histoire ressemble davantage à un conte moderne aux entournures métaphoriques, voir même poétiques. On reconnait d’emblée le ton et le style de Kokor qui livre ici un album absolument passionnant, sublime critique du monde de l’édition, des succès littéraires à la gloire éphémère, de ces livres évènements qui se construisent sur les effets, des "malentendus". Mais en contre partie, il nous parle aussi de la création, de ses frustrations… Quand Arthur voit son œuvre lui être dérobée par deux fois (par le destin et par l’ours) il vit ça comme une véritable rupture dans son élan créatif et la seconde est vraiment une blessure qu’il n’arrive pas à cicatriser, une violente remise à zéro qui lui coupe son imagination et l’envie de simplement se relancer une seconde fois dans une aventure aussi prenante que la création.
Toutefois, Kokor se concentre bien plus sur les démêlés de l’ours Dan, sur ses rencontres et les sentiments exacerbés qu’il provoque sur son passage. Tous oublient qu’il s’agit d’un ours et ne voient en lui que l’écrivain "qui ressemble vaguement à Hemingway", celui qui les trouble par la finesse de son écriture, par cette personnalité complètement atypique, "légèrement autiste" sur les bords, au point ou les femmes rêvent de se glisser sous ses draps.
L’auteur pousse son idée absurde jusqu’au bout, forçant le décalage qu’il peut y avoir entre cet animal qui suit le mouvement et s’amuse à jouer les humains et cette ribambelle d’aficionados qui interprète, décrypte ou tente de simplement lire entre les lignes les grognements et ersatz de phrases qui apparaissent comme de subtils traits d’esprit !

L’album est donc à la fois bourré d’humour et le reflet d’une société du spectacle que l’on voit de loin, au travers des émissions de télé ou des interviews à la radio. Beaucoup d’habileté et d’ironie dans ce scénario parfaitement rythmé, servi par des planches de toute beauté, magnifique scénographie ou Kokor fait une nouvelle fois preuve d’un incroyable talent. Ses couleurs sont sublimes, ses perso extraordinairement expressifs et l’ensemble d’une fluidité folle !

Un nouvelle album ou l"artiste excelle. Un rendez-vous à ne pas manquer !

Très recommandé !

Par FredGri, le 29 août 2019

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