La chambre des officiers

Ingénieur des Arts et Métiers, spécialisé dans l’étude des ponts, Adrien Fournier intègre, dès les prémices de la Grande Guerre, un détachement militaire pour analyser les points stratégiques pour franchir la Meuse. Lors d’une étude de terrain proche du théâtre des opérations, le jeune officier est victime d’un tir de canon adverse qui le blesse très grièvement au visage. Il est alors déporté à l’arrière du front et est hospitalisé au Val de Grâce. Il se retrouve dans une chambre réservée aux officiers où d’autres gueules cassées viennent bientôt le rejoindre. Commence alors une longue reconstruction durant laquelle Adrien va apprendre à vivre avec son handicap au rythme de nombreuses opérations chirurgicales, de partage avec ses pairs défigurés et enfin avec le regard des autres. A ce titre, pourra-t-il être accepté par Clémence, une amourette d’un soir d’avant-guerre, à l’image de laquelle il s’est accroché durant sa convalescence douloureuse ?

Par phibes, le 20 avril 2023

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Notre avis sur La chambre des officiers

Après avoir été adapté au cinéma grâce au réalisateur François Dupeyron en 2001, le roman à succès de nombreuses fois primé de Marc Dugain publié en 1998 et intitulé La chambre des officiers se voit cette fois-ci adapté dans un nouveau format à savoir en bande dessinée. Cette initiative se veut portée par le scénariste Philippe Charlot (Le train des orphelins, Les sœurs Fox, Ellis Island, le Royal Fondement…) qui s’associe, pour la première fois, à l’illustrateur Alain Grand (Pour tout l’or du monde, Les enfants de la Liberté…).

Sous le couvert d’une couverture particulièrement explicite, le récit (si on n’a pas lu le roman ou pas vu l’adaptation cinématographique) relate une histoire dramatique qui prend ses racines dans les souvenirs du romancier et qui met en exergue la douloureuse reconstruction d’un jeune militaire marqué dans ses chairs lors de la première guerre mondiale. Pour cet exercice, Philippe Charlot s’est accaparé scrupuleusement le récit originel et en a soutiré l’essentiel, les temps les plus marquants pour faire son évocation.

C’est en employant une narration personnelle (liée à Adrien) très prégnante que l’auteur nous associe aux déboires de ce jeune officier et de ses compagnons, dans une description particulièrement édifiante, certes inhérente à l’époque mais qui traduit l’incroyable destinée de ces personnes défigurées à vie, mutilées, obligées de réapprendre à vivre avec leur trauma dans une société non préparée. De fait, le ton est fort, attristant par le fait que des humains ont été transformés en chair à canon mais aussi impressionnant du fait de leur résistance, de leurs efforts mutuels pour tenter de dépasser leur blessure, pour instaurer un lien, une amitié profonde. Le récit devient inexorablement un témoignage psychologiquement fort, émouvant, porté avec une réelle intensité par le scénariste.

Il en est de même pour Alain Grand qui réalise une illustration qui complète remarquablement la narration. Fournissant un réel effort documentaire, l’artiste trouve la justesse graphique qu’il sied pour dénoncer les effets horrifiques de la guerre tout en magnifiant la force de caractère de ces gueules cassées pour surmonter quand ils le pouvaient leur mal-être et leurs meurtrissures. Le travail est de fait de qualité que ce soit au niveau des décors d’époque et des personnages très représentatifs au niveau de leurs lésions profondes.

Une adaptation historique forte qui a le privilège d’être lisible par tous et qui participe remarquablement au devoir de mémoire.

Par Phibes, le 20 avril 2023

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