La cure

Depuis qu’il est petit, Acacio a deviné qu’il était différent. Peu lui importe les jeux des garçons, il leur préfère ceux plus tranquilles avec son amie Luisa. Il faut dire que ses camarades de classe ne lui pardonnent pas ce manque de virilité, ses cheveux longs et cette façon de rester à l’écart. Mais le plus dur, ce qu’il a du mal à véritablement comprendre c’est le rejet de ses parents qui voient dans ses manières une anormalité qui dérange leur confort familial, cette normalité si institutionnalisée. Il faut dire qu’au Brésil, l’homosexualité n’est absolument pas tolérée, elle est considérée comme une maladie qu’il faut traiter sans plus attendre. Acacio va donc progressivement devoir nier sa nature profonde, subir au fil des ans des humiliations, des traitements hospitaliers particulièrement violents et tenter de se construire une vie « saine » et « équilibrée », en accord avec Dieu et ses enseignements. Mais même s’il culpabilise, même s’il a dorénavant une famille, des enfants, Acacio n’en oublie pas pour autant ses sentiments…

Par fredgri, le 11 juin 2023

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Notre avis sur La cure

Dans notre société prétendument « ouverte » et « tolérante », on pourrait vaguement s’imaginer qu’aujourd’hui l’homosexualité est bien plus acceptée qu’auparavant. C’est peut-être en partie vrai, mais pas toujours autant qu’il le serait nécessaire, loin de là même.
Cet album témoigne pour nous d’une situation que beaucoup jugeront complètement incroyable, dans une société brésilienne qui réprouve l’homosexualité et qui l’a considéré pendant de nombreuses décennies comme une maladie mentale. On découvre ainsi, au fil des pages des traitements réservés aux homosexuels brésiliens entre les années 60 et les années 2000, sous les injonctions agressives de l’Église et le support de nombreux médecins. Et autant le dire, ces martelages idéologiques de croyants réac, ce lavage de cerveau interminable nous laissent d’une part sans voix, mais surtout ils nous font comprendre qu’on n’est peut-être pas si loin que ça du moyen-âge…

Loin de me lancer dans un débat sur la société face à l’homosexualité, ce qui n’est pas vraiment le but de cet article, je voulais surtout contextualiser le travail de l’auteur qui nous peint le portrait d’un pays qui stigmatise tout un pan de sa population en véhiculant des idées dangereusement nocives sur ce qui n’est avant tout qu’intimité. On est donc ému par ces remises en question d’Acacio, forcé pour pouvoir s’intégrer dans la société, de se « normaliser » souvent de force, d’en arriver même à considérer cette « déviance » comme coupable.
Le scénario prend le temps de bien installer le cadre de vie du « héros », de comprendre à la fois dans quelle ambiance familiale il a évolué, quel processus idéologique il doit accepter et quelle pression il subit jour après jour, de tous les côtés.

Dans une période de grands débats sur les genres qui confrontent la société moderne à des enjeux importants pour notre avenir, cet album apparait comme un cri de souffrance, comme un témoignage vital pour mieux appréhender le monde qui nous entoure.
Malgré tout, l’auteur ne se lance pas non plus dans un réquisitoire agressif, il nous raconte l’évolution d’une pensée, d’une émotion vive qui nous ouvre les yeux sur une situation à laquelle nous pourrions tous être confrontés à un moment donné.

Un album d’une très grande subtilité. Vivement conseillé.

Par FredGri, le 10 juillet 2023

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