La marée haute

 
Paul et Fanta se sont rencontrés un peu par hasard, à Paris. Lui vient de finir des études de cinéma, et elle est Burkinabé, en visite dans sa famille, chez une sœur, en banlieue. Le courant est tout de suite passé entre eux, et très vite, ils ont multiplié les rendez-vous.

Paul et Fanta ont très vite senti qu’ils avaient besoin l’un de l’autre et être séparés par le retour de la jeune femme en Afrique les a décidés à se revoir. Ils s’aiment… Paul est donc parti pour le Burkina Faso où il l’a retrouvée et où il a fait connaissance avec sa famille avant de parler de mariage avec le père. Carrément.

Et puis un beau matin, après s’être endormi aux côtés de sa belle, Paul a ouvert les yeux… à Paris. Qu’est-ce que cela voulait dire ?! Etait-ce ses visions d’étudiant en fac de cinéma qui lui avaient joué des tours ? Toutes ces sensations étaient-elles dues aux joints qu’il ne rechignait pas à se rouler de temps en temps ? Ou bien Paul avait-il rêvé, tout simplement ? C’est en tout cas avec la stupeur de celui qu’on a tiré du plus agréable des rêves qu’il a tout tenté pour y retourner…
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur La marée haute

 
Il y a une Rue de la Chance à Ouagadougou, au Burkina Faso. C’est celle où opèrent la plupart des vendeurs de billets de la Loterie Nationale Burkinabé. Mais pour Paul, ce jour-là, la Rue de la Chance devait se trouver à Paris… où il a eu le coup de foudre pour une jeune femme originaire de ce pays d’Afrique !

La marée haute raconte la relation qui va s’établir entre Paul le Blanc et Fanta la Noire et qui va conduire le premier dans un voyage à travers l’espace mais aussi à travers impressions et sentiments.

Avec un dessin en noir et blanc (eh, pardi !) qui parfois fait très croquis de voyages, Antony Huchette réussit à rendre belle son héroïne et chaleureuses ses planches. Ensuite, ce sont ses personnages qui font le reste : on a l’impression de voir avec les yeux amoureux de Paul ! Fanta est sensuelle, Paris est agréable, l’Afrique est avenante… Paul est sur un petit nuage, submergé par le bonheur dans lequel il nage, d’où probablement cette référence à l’eau dans le titre de la BD ainsi que dans les représentations qui sont faites des scènes d’amour, par exemple…

L’auteur joue effectivement sur le graphisme pour nous faire ressentir les épisodes vécus "entre deux mondes". On ne saura d’ailleurs pas toujours bien ce qui est réel et ce qui ne l’est pas, ce qui a été rêvé et ce qui a été vécu… Il y a les souvenirs d’enfance de l’apprenti cinéaste qui s’intercalent, il y a des présences qui se matérialisent, il y a peut-être aussi les trips dus au cannabis… Il y a le trait qui devient parfois gris, aussi, pour évoquer Fanta absente, et toujours cette eau dans laquelle Paul ne demande qu’à plonger. Même dans ce pays qu’est le Burkina et qui n’a pas de littoral…

Il y a des vues de Ouaga qui partagent la surface des pages avec celles représentant Paris, également. Les pensées des deux amoureux vont de l’un à l’autre, et même leurs villes semblent alors vouloir se superposer. Et puis il y a ces paysages en ombres chinoises à l’horizon desquels se dessinent tour à tour la grande mosquée de la capitale burkinabé, un grenier traditionnel ou les enchevêtrements de fils électriques zébrant le ciel au-dessus des voies africaines… Des paysages qui sentent bon la joie de vivre et qui décupleront ce sentiment aux yeux des lecteurs qui ont eu la chance de parcourir de tels endroits !

Il se dit que ceux qui y ont voyagé aiment une Africaine avant d’aimer l’Afrique. Paul n’y aura finalement peut-être jamais mis les pieds autrement qu’en rêve, mais on peut être sûr qu’il l’aurait aimée, l’Afrique de Fanta ! Antony Huchette, lui, semble avoir eu envie de prolonger le plaisir de ses voyages, et c’est avec talent qu’il parvient à s’exprimer.

Entre la peur que ça n’ait été qu’un rêve et le plaisir d’avoir au moins pu le rêver, La marée haute est une superbe histoire d’amour. Un frisson, comme un appel à fermer les yeux pour revivre tous ces instants encore et encore.

Superbe.
 

Par Sylvestre, le 25 novembre 2008

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