La soucoupe & le prisonnier

En 1993, toute la France découvre "La soucoupe et perroquet", documentaire de l’émission Strip-tease, « Le magazine qui vous déshabille », consacré à Jean-Claude Ladrat, personnage emblématique de Germignac, en Charente-Maritime. Dvd, rediffusions tv, puis internet, feront passer dans la légende ce gentil illuminé, sa maman, et le perroquet mort conservé quelque part au fond d’un tiroir de la salle à manger, ainsi que la soucoupe construite avec amour et passion par le vieux garçon, dans son jardin.

Les dialogues sont cultes, les « paranormal » et autres « merdier » raisonnent encore dans la tête des téléspectateurs, partagés entre le rire moqueur et la tendresse qui se dégage du quatuor mère-fils-perroquet-soucoupe.
En 2012, l’historien et journaliste Jean-Charles Chapuzet décide de faire sortir d’un certain oubli le Germignacais, en partant à sa recherche. C’est cette enquête, qu’il publiera sous le titre Mauvais Plan sur la comète : L’étrange odyssée d’un Haut Saintongeais (Éditions Marchialy, 2012).

La soucoupe & le prisonnier reprend ce travail, illustré par Boris Golzio. Les auteurs nous emmènent dans la jeunesse de Ladrat, évoquant, son engagement dans la marine marchande qui le conduira jusqu’au Triangle des Bermudes, et les traumatismes qui l’accompagnent, jusqu’au début de l’épopée spatiale, qui trouvera pourtant son apogée sur l’Atlantique, où notre fils d’extra-terrestre va dériver durant 91 jours !
Comme le reportage de Strip-tease, la BD dresse un portrait attachant du bonhomme, et traite avec pudeur ce qui va finalement faire du doux cinglé le prisonnier condamné pour attouchements sexuels sur mineurs…
Le dessin de Golzio colle parfaitement avec cette enquête dessinée, son trait donnant vie avec talent à ces gens simples et à ce parcours de vie à l’issue terrible, après avoir suscité l’intérêt médiatique.

La soucoupe & le prisonnier retrace avec brio le parcours d’un homme qui garde tout son mystère , et dont une partie rocambolesque de la vie appartient désormais à la pop culture. Chapuzet tente d’éclaircir les zones d’ombres qui le conduiront à l’irréparable, et de fouiller ce qu’il y a derrière son quart-d’heure de gloire. Un beau travail de journalisme, joliment mis en dessin, et procurant une agréable lecture, que l’on découvre le personnage, ou pas !

Par V. DEGACHE, le 4 juin 2021