La Vérité sur l'Affaire Vivès
En décembre 2022 éclate ce qui est désormais connu comme « l’affaire Vivès ». Bastien Vivès est alors accusé de faire l’apologie de la pédophilie, de la pédocriminalité, de l’inceste et du viol à travers trois albums qui posent problème. A l’issue d’un lynchage populaire, dans les règles de l’art, de propos polémiques de l’accusé, Angoulême annule une expo « carte blanche » de l’auteur et ce dernier se retrouve soudain marqué au fer sur la blackliste de tout le milieu… Presque deux ans plus tard, il propose cet album témoignage…
Par fredgri, le 31 octobre 2024
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Scénariste :
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dessinateur :
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Sortie :
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ISBN :
9782487609013
Notre avis sur La Vérité sur l’Affaire Vivès
Bon…
Je vais plutôt me concentrer sur l’album lui même et finalement pas directement sur la dite « Affaire Vivès ». Car dès que l’on découvre les premières planches de cet album on se rend compte qu’il est bien plus question du vécu de l’auteur que des évènements qui ont engrangé tout le reste, de tout ce qu’il peux ressentir au fil des tests qu’on lui fait passer alors qu’il ne cesse de préciser à longueur de temps qu’en effet, il n’est pas coupable de ce dont on l’accuse, de tous ces amalgames qu’il doit subir, devenant aux yeux de tous ceux qu’il croise un prédateur pédophile qui doit se sevrer de ses pulsions.
Au moment ou commence ce volume, Bastien Vivès apprend, après avoir subi de nombreux interrogatoires avec la police, qu’il est convoqué à un stage « anti-pédophile » qui permettra de déterminer la véracité des accusations. C’est sensé durer entre 1 et 6 mois, ou il sera isolé loin de sa famille.
Vivès dénonce ainsi l’absurdité de ce système qui l’a soudain englouti, ne cherchant pas à l’entendre, ni à prendre du recul, mais à l’enfermer derrière une image de pervers avec laquelle il va dorénavant devoir composer. Évidemment, il n’est pas question pour lui non plus de prendre du recul sur ce qui lui est reproché, d’admettre quoi que ce soit, tout est exagéré, détourné et amalgamé… Il n’est que la victime d’un système qui n’est pas là pour faire dans les nuances. Cependant, il accentue l’absurdité kafkaïenne de la situation en y mêlant une sorte d’humour résigné, presque vain, qui, même si l’on comprend parfaitement la pénible ingérence imposée dans le quotidien de l’auteur et de sa famille, a pour effet d’arrondir les angles.
Malgré tout, en optant pour le pathos qui veut sensibiliser le lecteur à sa situation, Vivès en oublierait presque de véritablement parler de « sa vérité » sur l’affaire, de contextualiser… Il rend une copie qui nous parle des effets néfastes qui l’ont harassé, il répète son innocence en boucle, témoigne de ce qui lui est arrivé (même métaphoriquement), mais n’explique rien en particulier, s’attardant sur le caractère ubuesque de cette condamnation, sans appel.
Dans ce genre d’affaires, comme il en est révélé de plus en plus, l’accusé n’a finalement qu’assez peu l’occasion de prendre la parole, et encore moins quand il est question de précipiter les choses, dans la violence des accusations passionnelles qui refusent de l’écouter. Soutenu par un groupe d’irréductibles défenseurs de la liberté d’expression, Vivès a pu ainsi donner un avis (un peu à l’exemple d’une récente interview parue dans la presse), en demi-teinte, sans trop vouloir froisser, sans trop s’expliquer, sans trop en avoir l’air, avec ce qu’il faut de mini points polémiques.
Il en ressort un album assez mitigé qui dit sans dire, qui reste dans la périphérie de son sujet, mais qui nous parle surtout d’une machinerie populaire qui s’emballe sans chercher à creuser.
Le lecteur sera alors libre de penser ce qu’il veut, de croire, d’écouter, de montrer du doigts, d’accuser ou simplement de passer à autre chose…
Par FredGri, le 31 octobre 2024
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