Le Captivé

Modeste employé à Bordeaux dans les années 1880, Albert Dadas a commencé à « fuguer » dès l’adolescence, suite à une chute sur la tête. À l’énoncé d’un nom de ville ou de pays, comme un somnambule, il part, quitte sa maison et commence à marcher. Ça se passe toujours ainsi : « Tout d’un coup, j’ai très chaud, j’ai des suées, j’ai mal à la tête… Il faut absolument que je marche… Et après je ne me souviens de rien. » Il ne sait pas quand il part. Il le sait après, et en est extrêmement malheureux. Ses périples involontaires le mènent à Pau, Paris, Marseille mais aussi en Algérie, à Moscou (où il sera enfermé, soupçonné d’avoir tué le tsar !), Poznan en Pologne, Vienne en Autriche, Liège… Il peut parcourir jusqu’à 70 km par jour ! Et il se « réveille » à l’hôpital ou en prison, sans papiers, sans argent… En mai 1886, il rencontre Philippe Tissié, un jeune interne en psychiatrie à l’hôpital Saint André de Bordeaux, qui parvient à le soigner. Dadas pourra enfin mener une vie normale, se marier et avoir une fille. (Résumé éditeur)

Par melville, le 1 juin 2014

Notre avis sur Le Captivé

« Comme dans certains films de François Truffaut, nous pouvons écrire ce qu’est devenu Albert Dadas après sa dernière rencontre avec le docteur Philippe Tissié. […] » (Christophe Dabitch en introduction du dossier commentant la vie des personnages). Dans Le Captivé de Dabitch et Durieux, les influences des cinémas de Truffaut et Cronenberg sont palpables et c’est en partie de cet étonnant mariage que le récit tire tout son sel. Du cinéaste de la Nouvelle Vague Dabitch « empreinte » la dimension littéraire, très écrite des dialogues, et en même temps très vivante. A plusieurs reprises des personnages témoignent face au lecteur comme dans une sorte d’aparté : un dispositif qui permet de resserrer ce qui aurait pu être une voix off tout au long du récit et offre ainsi pleinement le champ au dessin. De David Cronenberg, et plus précisément de son film A Dangerous Method (2011), Durieux retient le travail de recherche sur la position de la caméra et le choix des objectifs mais ne fait jamais du cinéma sur papier. Si il est beaucoup question de cinéma dans les références (à qui chacun est libre d’adhérer ou non), c’est bien de bande dessinée dont on a à faire avant tout dans Le Captivé. Avec une infinie douceur Christian Durieux explore les possibilités que lui offre son support et utilise son dessin (travail sur les nuances de gris, présence ou absence du décor) et la mise en page de ses planches pour transmettre des émotions par l’image. En quelques planches muettes beaucoup de choses des relations qui lient les personnages sont exprimées.

A eux deux Christophe Dabitch et Christian Durieux parviennent à dépasser le simple récit biographique pour raconter une histoire qui parle de nous. En cela Le Captivé sort du lot de la tendance actuelle de Futuropolis (entre les récits plats estampillés « tirés d’une histoire vraie » et les exercices de styles artys) et se hisse aux côtés des grands albums de sa période faste d’il y a quelques années.

Un must à posséder d’urgence !

Par melville, le 1 juin 2014

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