LE FAUVE DE CORLEONE
Né en en 1930 à Corleone, Toto Riina va peu à peu gravir les échelons de la Cosa Nostra, devenant un maillon essentiel de l’organisation criminelle qui ensanglantera Palerme et toute la Sicile. Le Fauve de Corleone est le récit de la vie d’un homme qui sèmera la terreur, et laissera derrière lui nombre de cadavres…
Par v-degache, le 31 janvier 2024
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Scénariste :
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Éditeur :
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Sortie :
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ISBN :
9782413044451
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2 avis sur LE FAUVE DE CORLEONE
Après avoir ravi les amateurs de bd avec son adaptation en 2020 des Croix de bois de Roland Dorgelès, puis avec La ferme de l’enfant-loup sur le Maquis du Vercors en 2021, c’est un grand plaisir de retrouver l’Argentin Facundo Percio avec cette biographie sur le célèbre mafioso de la Cosa Nostra, Toto Riina, épaulé au dessin par ses compatriotes Facundo Teyo et Vladimiro Merino, sur un scénario du toujours très inspiré Jean-David Morvan.
De sa jeunesse marquée par le traumatisme des décès accidentels de son père et d’un de ses frères auxquels il assiste, jusqu’à l’attentat contre le juge anti-mafia Giovanni Falcone en 1992, nous suivons l’ascension puis l’inévitable chute de celui qui va semer la mort et répandre la terreur sur la Sicile. Entrecoupé de scènes de détention, durant lesquelles Riina échange avec sa conscience, les auteurs dressent un portrait qui participe à la démythification de la « Pieuvre », bien loin d’un certain romantisme popularisé par l’adaptation au cinéma du roman de Mario Puzo, Le Parrain. Palerme occupe aussi une place centrale dans le récit, et l’on comprend au fil des pages pourquoi les actes de la Cosa Nostra sont toujours un traumatisme pour une ville dont les murs portent aujourd’hui encore le rejet total de ce système mafieux.
Quant aux dessins du trio Percio – Teyo – Merino, il est le plus souvent d’un réalisme implacable, laissant parfois les formes s’effacer pour traiter l’horreur où le mystère, comme sur la double page relatant l’incroyable réunion mafieuse dans les catacombes des Capucins et ses cadavres momifiés maintenus debout et habillés. Une colorisation sobre variant les teintes de marron et d’ocre renforce la noirceur et la gravité de l’ouvrage, maintenant une unité dans un récit qui vous tiendra en haleine jusqu’au bout.
Ce Fauve de Corleone est l’histoire de « la Belva », le fauve, mais c’est aussi celle d’une Italie meurtrie et ensanglantée par l’organisation criminelle durant des décennies, rongée par la corruption et les affaires. Forte, habilement narrée, et éclairée par le dessin du trio argentin, cette « vie de Toto Riina, parrain de la Cosa Nostra » en version bd est plus que recommandée !
Par V. DEGACHE, le 31 janvier 2024
A l’instar d’un Marco Polo qui, dans la cellule qu’il partage avec un autre, revient sur les moments forts de sa vie, Salvatore Riina raconte sa vie à son co-détenu qui l’interroge à ce sujet. Issu d’une pauvre famille d’agriculteurs, Riina perdra très vite son père et un frère dans une explosion accidentelle. Brutalement promu soutien de famille, le jeune homme subira rapidement l’influence de mauvaises fréquentations avant de succomber aux sirènes de la mafia sicilienne dont il deviendra un redoutable chef doublé d’un criminel sans compassion.
C’est suite à un malheureux coup du sort que la vie du petit Salvatore va basculer. Obligé de quitter l’enfance plus vite que prévu, le jeune Sicilien va s’endurcir très précocement au contact de bandits en tout genre qui l’enrôleront puis profiteront de sa rage, de son inconscience et de sa volonté de rester toujours la tête hors de l’eau pour faire leur sale besogne. Vols en bande organisée, puis premier homicide… Le curriculum vitae de Salvatore « Toto » Riina va rapidement s’étoffer et la réputation de violence qui le précédera lui ouvrira la voie vers un des trônes les plus convoités au pays de la Mafia : celui du chef de la Cosa Nostra.
Par un jeu de flashbacks mis au service d’une narration confiée à un Riina « en fin de carrière » et à son codétenu du moment, c’est la triste vie d’un homme qui nous est racontée. Une vie bien peu enviable, en vérité. Une vie jalonnée de mille morts qui, à l’intéressé, ne laissera pas le temps de sortir d’une certaine ignorance mais le poussera toujours plus loin dans une logique de la loi du plus fort. Bulldozer sans aucune compassion, Riina gravera certes son nom dans l’Histoire italienne en lettres de sang mais bradera pour cela, en contrepartie, de très nombreuses années de sa vie qu’il passera traqué ou croupissant derrière les barreaux. Une vie, dites-vous ?
Digne des films les plus violents, la vie de Salvatore Riina nous est ici projetée en bandes dessinée par un quatuor d’artistes qui traitent son cas comme on le ferait de celui d’un héros justifiant ses actions par des mots comme honneur alors qu’aux yeux du plus grand nombre, il est loin d’en être un. Un dessin plutôt sombre et sale met en images les nombreuses actions écœurantes qu’on lui doit de près ou de loin et qui ont fait de lui une légende. Au fil des pages, l’ambiance est lourde comme le serait l’air d’un cachot mal aéré.
Une alternative à l’épisode dramatique qui a présidé au destin de Riina enfant est proposée dans les toutes dernières pages. Inutile bonne intention, elle ne réussira pas à nous rendre le bonhomme sympathique. Enfant devenu monstre, Riina fut un parrain de la Mafia. On n’est pas là pour pleurer sur son sort, mais pour revisionner le film de sa vie.
Par Sylvestre, le 19 février 2024
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