Le grand mal

Quel soulagement pour ces soldats lorsque leur commandement les a détachés pour une mission loin de la ligne de front ! C’est donc le sourire aux lèvres qu’Aram et quelques compagnons de régiment ont suivi un de leurs gradés sur une route qui s’enfonçait dans le désert. Ils ne savaient alors pas que leur route allait s’arrêter un peu plus loin… Ils ne savaient pas qu’ils allaient tomber sous les balles de leur propre encadrement !

Leur ticket pour la mort, c’était leurs origines arméniennes. Un vent de xénophobie avait soufflé sur la région et les Turcs ne voulaient plus entendre parler des Arméniens : de leurs chefs politiques étaient descendus des ordres de massacre systématique de la population arménienne sous des noms de codes politiquement corrects…

Loin de là, Sciuscik et Sona étaient aussi sur les routes, déportées avec de nombreux autres Arméniens encadrés eux aussi par des représentants du gouvernement turc. Si l’une s’évertuait à croire à un avenir meilleur, l’autre avait bien compris que leur sort serait le même que celui de tous ces gens dont ils trouvaient les cadavres sur le bord de la route…
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur Le grand mal

Paolo Cossi, bien qu’il ait publié en Italie plusieurs ouvrages, n’arrive qu’en ce début d’année 2009 dans l’univers du 9ème art francophone et c’est avec cette BD, Medz Yeghern, que les éditions Dargaud portent son talent à notre connaissance.

Avec un dessin en noir et blanc usant parfois du caricatural et créant ainsi un fort décalage entre l’humour que pourrait porter le trait et le drame dont il est question dans le récit, le jeune artiste italien dénonce le génocide arménien par les Turcs lors de la première guerre mondiale ; génocide aujourd’hui encore sujet à discorde et d’actualité notamment dans le cadre des pourparlers avec la Turquie pour son entrée dans l’union européenne.

D’une simplicité relative, le graphisme de Paolo Cossi n’est pas peu efficace. Débarrassant ainsi de toute fioriture ou de tout élément superflu chacune des vignettes, il renforce l’horreur suscitée par l’extermination sauvage des Arméniens par les Turcs alors persuadés que leur réussite totale leur épargnerait toutes poursuites, accusations ou procès internationaux.

Cette horreur, Paolo Cossi la dessine. Crûment. Et il la met en scène de manière forte, faisant coller les destins de petites gens dont on suivra les parcours (et qui pour certaines sont liées) à l’Histoire qui s’écrivait en lettres de sang et de honte.

Ouvrage clairement accusateur, Medz Yeghern est au génocide Arménien ce que sont à la Shoah tous les livres, les films et autres initiatives tenant en éveil la mémoire du peuple juif. C’est une œuvre très forte à découvrir et une page d’histoire à lire à propos de massacres qui n’avaient jusqu’alors eu que très peu d’impact sur la conscience des Européens que nous sommes.
 

Par Sylvestre, le 24 février 2009

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