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LE GRAND MONDE

A Paris, en 1948, le journaliste François Pelletier se rend précipitamment sur son lieu de travail lorsqu’il est arrêté par les services du renseignement. Menotté, il est entraîné dans des locaux où il retrouve sa sœur Hélène et son frère Jean eux-mêmes retenus. Face à eux, l’enquêteur Lagrange décline, tout en déplorant l’absence d’Etienne, un autre frère à François, leur identité respective ainsi que leur pédigrée et leur explique très brièvement ses intentions, à savoir briser leur famille et faire guillotiner leurs parents. Pourquoi une telle affirmation radicale ? Qu’a bien pu faire la famille Pelletier pour mettre l’Etat dans un tel émoi ? Retour donc sept mois plus tôt, au moment où les Pelletier partagent un repas dans la maison familiale à Beyrouth durant lequel les quatre enfants ont confirmé leur intention de ne pas poursuivre l’activité de leurs parents, une savonnerie pourtant en plein essor. François et Jean ont pris leurs marques à Paris, Etienne a décidé de partir à Saïgon pour tenter de retrouver son ami Raymond, et Hélène espère faire l’école des Beaux-Arts dans la Capitale française…

Par phibes, le 7 février 2025

Notre avis sur LE GRAND MONDE

Christian de Metter continue plus que jamais à adapter en bande dessinée les œuvres de l’écrivain émérite Pierre Lemaître. Après Au revoir là-haut (en 2015), Couleur de l’incendie (en 2020) et Miroir de nos peines (en 2023), l’artiste s’applique cette fois-ci à illustrer le roman intitulé Le grand monde sorti en 2022.

Evidemment, contracter une œuvre de presque 600 pages en moins de 180 planches n’est surement pas un travail aisé et à cet exercice, l’on peut concéder à l’artiste a réalisé un travail des plus honorables pour ne pas dire remarquable, et ce, à tout point de vue. Choisissant pour se faire les temps les plus forts du roman, Christian de Metter a fait en sorte d’assurer à son lecteur un décryptage sombre qui se suffit à lui-même pour planter le décor après-guerre et d’y associer les pérégrinations de la fratrie des Pelletier, le tout pour répondre au mystère suscité par les premières planches de l’album.

Il ne fait aucun doute que le parcours dramatique d’Etienne sur les terres vietnamiennes, soulevant des trafics pour le moins stupéfiants, les enquêtes journalistiques de son frère François sur des meurtres suspects et puis sur la disparition d’Etienne, le comportement trouble de Jean grevé par celui de son épouse pesante, la rébellion d’Hélène sont de nature à susciter une réelle envie de découvrir jusqu’où tout ça peut aller. La tournure de cette équipée qui rejoint un tant soit peu celle relatée dans Au revoir là-haut, se veut, entre manipulations et mensonges, des plus tortueuses tant les rebondissements, certains tragiques d’autres désarmants, sont au rendez-vous, orientant les péripéties là où on ne les attend pas.

Evidemment, si l’effort de césure du roman originel se veut manifeste, cet album a le privilège d’être mis en images à la faveur d’une palette graphique utilisée intelligemment. Usant d’une colorisation de pointe, non excessive et surtout parfaitement en adéquation avec le contexte historique post-guerre, Christian de Metter nous offre un dessin des plus esthétiques, soigné dans le détail avec un encrage fin et réaliste. Ces vignettes, gonflées de dialogues, confirment un travail documentaire de fonds importants et profitable pour mettre en évidence des instantanés d’époque de qualité.

Une bien belle et inquiétante adaptation du succès littéraire de Pierre Lemaître à découvrir chez Rue de Sèvres qui n’est pas sans donner l’envie furieuse de se plonger dans l’œuvre originelle.

Par Phibes, le 07 février 2025

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