Le jeu lugubre

Derrière ce portrait d’artiste, ce "Salvadore Deseo", il faut évidemment reconnaître Salvadore Dali, et tout l’album relate l’immersion du "héros" dans cet univers ou la vie se mélange à l’Art, ou les détails intègrent l’œuvre pour se conclure en apothéose hallucinatoire macabre !

Toutefois, Paco Roca "habille" son récit pour ne pas se contenter de n’être qu’une succession de références hermétiques. On rencontre ce peintre reclus dans sa maison, avec sa femme d’origine russe et deux invités que l’on ne voit que très peu en fin de compte. On suit Jonas, le nouveau secrétaire de l’artiste qui découvre le quotidien de Deseo (Désir en espagnol), son étrange façon de provoquer des hallucinations, de s’automutiler, de mettre en scène des scénettes étranges et glauques, tout en parlant de lui à la troisième personne et tenant un discours méprisant sur l’Art et les artistes en général !
Petit à petit, nous voyons ce petit monde prendre des reliefs de plus en plus complexes et malsains, tandis que Jonas commence à entreprendre de s’enfuir, si possible avec la jeune Rosa qu’il a rencontré au village.

Cette fiction est donc présentée comme étant réelle, bien que dès le début on se rend compte des références à Dali à peine voilées. Il faut donc lire cet album au second degré, découvrir les doubles sens derrière les corps mutilés, derrière les cadavres… L’album prend alors un tout nouveau sens, un second regard ! Mais Paco Roca ne se perd pas non plus dans une intrigue nébuleuse, loin de là (peut-être sur les dernières pages), il développe une histoire plutôt subtile que je vous conseille vivement de relire !

Il n’a pas encore la finesse qu’il aura plus tard, toutefois, cet "ancien" album devrait attirer votre attention si vous aimez son travail !

Par FredGri, le 4 septembre 2016