Le joueur

Précepteur sans le sou dans une famille d’un haut militaire russe, Alexeïï Vanovïtch a rejoint cette dernière à la ville thermale de Roulettenbourg en Allemagne. Il y retrouve dans un hôtel luxueux outre le Général et ses proches, Astley, une ancienne connaissance anglaise et l’insupportable français Marquis Des Grieux suspendu à la belle nièce de l’officier supérieur, Polina Alexandrovna. La fête qui bat son plein n’est que mascarade car la famille du Général est désargentée et attend impatiemment, pour redorer son blason, le décès de celle qui détient une immense fortune à savoir l’aïeule du militaire. Ne pouvant se permettre d’espérer indéfiniment, Polina demande à Alexeïï d’aller jouer pour elle au Casino. C’est ainsi qu’il passe le seuil d’un univers inconnu par lui-même qui, peu à peu, va l’enfiévrer au point d’en devenir totalement dépendant. Bien que la famille du Général recèle bien des secrets dont l’analyse pourrait accaparer son esprit et alors que l’amour pour Polina semble enflammer son âme, Alexeïï va entretenir cette addiction qui va se confirmer par l’arrivée inopinée de la grand-mère. Mais à trop jouer, que va-t-il réellement gagner ?

 

Par phibes, le 18 août 2010

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Notre avis sur Le joueur

Après À bord de l’Étoile Matutine  de Riff Reb’s et Le Dernier des Mohicans de Cromwell, la sympathique collection Noctambule de Chez Soleil dirigée par Clotilde Vu s’enrichit par l’intégration de ce nouvel album réalisé par Stéphane Miquel et Loïc Godart. Conformément à la ligne directrice de cette collection qui s’est donnée pour mission éditoriale d’assurer le lien entre la littérature et la bande dessinée, « Le joueur » se veut être une libre adaptation du roman éponyme écrit par Fedor Dostoïevski.

L’histoire en question qui relate la destinée tortueuse d’Alexeïï Vanovïtch, un outchïtel travaillant en tant que précepteur dans une famille de noble lignée, se révèle d’une force évocatrice extraordinaire. En effet, historiquement, elle nous plonge dans les ambiances russes du 19ème et plus particulièrement dans celles d’une famille désargentée qui ne voit son salut que dans la perspective d’un héritage ou d’un gain aux jeux de hasard. Elle augure également une équipée implacable liée à la situation désastreuse du personnage principal qui, d’un prologue incisif, vient dresser les bases du récit de sa destinée tragique.

Fidèles à la trame du récit original qui a été découpé par Stéphane Miquel de façon bien structurée, les péripéties s’enchaînent au rythme, d’une part, des déboires amoureux que connaît Alexeïï vis-à-vis de Polina, à la fois jaloux, soumis et rebelle, ballotté entre Astley, Des Grieux et la famille quelque peu insolite du Général. D’autre part, et c’est là où l’intrigue est la plus forte, son dévouement à l’encontre de la belle lui ouvre un univers qui va modifier sensiblement sa destinée au regard d’une addiction naissante au jeu de la roulette, qui va à la fois lui permettre de gagner pécuniairement et aussi lui faire perdre la réalité des choses. Toute la narration réside dans cette ambivalence ambiante, au gré de laquelle les espoirs et les désillusions vont se déclarer.

Le dessin de Loïc Godart est des plus attirants. Son trait, incisif et fougueux, révèle un travail atypique, à la fois brut et délicat par le biais duquel il reconstitue adroitement les ambiances historiques. Son coup de crayon est anguleux, parfois caricatural, et joue en finesse avec l’aura et les expressions de ses personnages. De même, pour les arrière-plans, l’artiste peut limiter son intervention à peu de choses comme il peut également faire preuve d’une recherche détaillée superbement poussée. Le tout est accompagnée d’une colorisation directe excellente qui lui donne un aspect ancien appréciable.

Une adaptation réussie digne de figurer au catalogue de la collection Noctambule et dont le thème évoqué sur l’addiction aux jeux, auquel, certes, Fedor Dostoïevski était lui-même confronté, confirme que quand les jeux sont faits, rien ne va plus par la suite ! Une mise gagnante pour Stéphane Miquel et Loïc Godart.

 

Par Phibes, le 18 août 2010

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