Le marathon de New York à la petite semelle

 
Sébastien dînait avec sa femme et un couple d’amis, il était le seul des quatre à ne pas pratiquer la course à pied. Alors que les trois "runners" étaient en train de réfléchir à une course à laquelle ils pourraient s’inscrire, le marathon de New York s’est invité dans la conversation, entre rêve et blague lancée à tout hasard.

Tout le monde s’est accroché à cette proposition un peu farfelue : New York était en effet un rêve pour chacun. Mais la décision… était prise !

Sébastien a alors annoncé que lui aussi participerait à la course. Autant dire qu’il n’a pas été pris au sérieux ! Pourtant, il l’était, et c’est ainsi que Sébastien a commencé l’entraînement, histoire de ne pas être complètement ridicule le jour où il s’élancerait de la ligne de départ…
 

Par sylvestre, le 16 octobre 2016

Notre avis sur Le marathon de New York à la petite semelle

 
Les défis qu’on se lance devant témoins (à part si l’assemblée en question est un groupe de buveurs déjà bien chargés, bien entendu !) engagent plus que ces résolutions plus ou moins importantes que l’on prend en n’en parlant qu’à soi-même. On reste parfois longtemps avec en soi une envie qu’on ne concrétise pas. Il ne tient alors qu’à soi de l’exprimer pour que déjà, elle se mette à exister un peu plus concrètement.

C’est ce qui est arrivé à Sébastien… Entouré de coureurs de fond depuis des années, en couple avec l’une d’eux, il se sentait peut-être un peu ostracisé lors de ces conversations auxquelles il ne pouvait pas vraiment prendre part à fond. Quand le déclic s’est fait (merci New York !), Sébastien s’est lancé… Ce n’était pas facile ! Un peu comme quand on veut déclarer sa flamme : on a surtout peur de la moquerie de trop qui fera qu’on reviendra finalement sur sa décision.

Mais il y a le mental. Sébastien se connaissait, ou croyait se connaître. Il est donc allé outre les réflexions qu’il aurait pu mal prendre et, passé ce cap, il n’avait (presque) plus que lui sur qui compter pour prouver qu’il était capable de faire ce qu’il avait annoncé pouvoir faire ; en l’occurrence, courir un marathon. Barre mise bien haut, pour quelqu’un qui ne faisait pas de sport du tout !

Le marathon de New York à la petite semelle (hé, hé, jeu de mots, Maître Capello !) part de là… Et nous raconte la suite : comment Sébastien Samson, l’auteur, se prépare. Comment il doute, persiste, redoute, se lance au risque d’y laisser des plumes puis comment, un beau jour, il s’envole… à Dieu vat !

Son récit est une histoire à regarder "de l’extérieur", mais c’est aussi bien sûr une histoire intérieure avec moult dialogues avec soi-même doublée à l’occasion de nécessaires petits exposés techniques. (Vous apprécierez beaucoup vous aussi les séquences "ce qui se passe à l’intérieur du corps", où les enzymes sont de petits ouvriers qui maintiennent la "machine" en état de marche !) Il faut beaucoup se parler lorsqu’on est seul et qu’on se lance dans une telle entreprise. D’autres diraient qu’il faut être épaulé, conseillé, coaché… Mais Sébastien n’y croyait malgré tout peut-être qu’à moitié et avait prévu que s’il devait flancher, il le ferait comme les oiseaux meurent : en se cachant.

Voix off ou bulles pour soi-même, parcours de plus en plus longs dans les paysages de sa Normandie… Interactions avec sa compagne et les amis avec qui le voyage à New York est prévu… L’entraînement est dur, mais assez vite, le corps et la tête changent, s’adaptent… Des paliers sont franchis les uns après les autres, ouvrant des perspectives différentes, donnant de la confiance en soi… Sébastien progresse, c’est déjà ça, mais sans savoir "ce qu’il vaudrait" face à d’autres.

Car s’il est question du regard sur soi-même, il est bien sûr aussi question du regard des autres sur soi. Le sport, c’est parfois pour soi, égoïste, mais c’est aussi parfois une affaire de compétition, de confrontation avec d’autres. Alors il faut se donner les moyens, "habiter" de plus en plus dans ce qu’on fait. Et tout ça, Sébastien Samson en parle fort bien. Et nous le livre en images, en noir et blanc, dans un style assez humoristique ; peut-être loin de certains états d’esprit dans lesquels il a dû se trouver les matins où il s’est levé courbaturé à mort !

Mais ce récit autobiographique nous rapproche peu à peu de New York, et il nous y conduit. Il a été question d’efforts, il sera aussi question de récompenses. Des récompenses directement liées au physique, aux progrès, au classement, au défi, mais des récompenses liées aussi au contexte, aux ambiances… Car être acteur du marathon de New York, c’est quand même quelque chose ! Autre chose que simplement participer au cross de tel ou tel bled paumé et boueux ; même s’il a bien fallu en passer un peu par là avant. Et ça aussi, on le perçoit dans ce que nous raconte l’auteur de cette bande dessinée.

"A la petite semelle", mais chapeau quand même, l’artiste ! Sébastien Samson n’a pas eu "que la gueule" : il a véritablement rempli le contrat à sa façon. Et "doublement", même, puisqu’il nous expose toute cette aventure en bandes dessinées ; autre marathon en son genre ! Une BD qui aurait pu – pour le jeu de mots – faire partie de la collection Contre-pied des éditions La Boîte à Bulles, mais qui aura finalement rejoint les titres de la collection Contre-coeur… Une BD très intéressante, en tout cas, avec au menu de l’intimisme, du reportage, du sport, de l’humour et pourquoi aussi pas une médaille à la clé ? (Ou des prix BD, pendant qu’on y est ?!)

Bravo ! Et à vous, lecteurs : en piste pour la lecture !
 

Par Sylvestre, le 16 octobre 2016

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