Le silence de Lounès
Fils de l’immigration, Giani l’italien d’origine et Nouredine le kabyle se vouent une amitié sans faille depuis leur jeune âge. Partageant les mêmes goûts, les mêmes coups, ils ont grandi ensemble sur les bords des chantiers navals de Saint Nazaire. D’ailleurs, à l’image de leurs ainés, ils ont été embauchés comme ouvriers dans un des fameux chantiers. Toutefois, Nouredine entretient une rancœur de plus en plus forte vis-à-vis de son père Lounès qu’il suspecte de ne pas avoir pris part à la guerre d’Algérie et d’avoir même fait profil bas en s’expatriant en France. Aussi, ce silence pour le moins cruel le pousse progressivement à faire des actes toujours plus radicaux. Les menaces de fermeture de l’usine vont lui donner l’occasion de faire éclater sa colère et de perpétrer des actions extrêmes. Il finit par être arrêté et jugé, et parvient même à s’évader. Il décide alors, avec la complicité de son ami et beau-frère Giani de fuir en Algérie. Y trouvera-t-il le moyen de combler le silence de son père ?
Par phibes, le 7 décembre 2013
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Scénariste :
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dessinateur :
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Éditeur :
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Sortie :
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ISBN :
9782203058279
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Notre avis sur Le silence de Lounès
Après avoir, rien que pour l’année 2013, signé sous l’égide de son éditeur de prédilection Casterman, l’adaptation du roman de Jean Vautrin intitulé Canicule, Baru revient dans le paysage de la bande dessinée et sur les étalages en scénarisant une nouvelle histoire aux accents dramatiques.
Le silence de Lounès est donc un récit complet sur fonds de fresque sociale et familiale qui vient mettre en évidence la douleur psychologique d’un fils d’immigré reprochant à son père de ne pas lui avoir expliqué certains de ses agissements durant un pan de son passé et d’avoir par ce biais semé, en son esprit, un doute cruel. A cet égard, le lecteur se voit donc le témoin de cette rage intimiste exponentielle qui s’amplifie au fil du temps et qui pousse ce personnage révolté dans des retranchements de plus en plus extrémistes.
Structurant son histoire de manière chronologique, dans des transitions temporelles rapides qui, peut être, auraient pu être mieux marquées via des dates ou un petit texte introductif, Baru introduit assez vite le malaise de Nouredine qui va perdurer tout au long de l’ouvrage et qui va initier une intrigue autour de son père Lounès et de ce qu’il a tu à son fils.
Se basant sur des faits historiques particulièrement forts (la guerre d’Algérie) et sur un fonds social bien ciblé (l’intégration en France, la précarité de l’emploi…), l’histoire de Nouredine possède certes une certaine amertume mais aussi une sensibilité pour le moins fascinante. De son amitié indéfectible avec Giani à sa quête algérienne en passant par ses engagements violents, celui-ci nous assure d’un parcours mouvementé qui le pousse indubitablement à se battre contre ce qu’il ignore de son père et ce, sans retour possible. Sa fureur, remarquablement bien démontrée, révèle le degré de révolte dont est animé cet individu et quelque part sa soif de comprendre.
Bien sûr, afin de contrebalancer l’émoi de Nouredine, Baru dévoile, et ce par tranche d’aveu, ce que Lounès n’a pas su expliquer à son fils. Force est de constater que la réponse que l’on va obtenir via des témoignages, va, de façon simple et habile, remettre en question l’image de départ de ce père taiseux.
Côté dessins, Pierre Place qui signe pour la première fois chez Casterman, nous assure d’un travail en couleurs directes particulièrement adroit. Malgré quelques petites difficultés au niveau des visages qui parfois ne permettent pas d’identifier certains protagonistes, on peut lui reconnaître que son trait verse dans une sensibilité et un réalisme convaincants. Il est vrai qu’il a su le faire évoluer profitablement depuis son premier ouvrage Au Rallye (chez Warum) et qu’il en use bien harmonieusement dans des vignettes à taille variable. On saluera tout particulièrement ses planches entières qui se veulent d’une grande beauté, tant par le jeu des couleurs que par la rigueur picturale employée.
Un one-shot pour le moins attendrissant signé par deux artistes en pleine possession de leurs moyens artistiques.
Par Phibes, le 7 décembre 2013