LÉON LA CAME
Léon la came

Léonce Houx-Wardiougue, dit Léon la came, est le fondateur de l’une des plus célèbres entreprises de cosmétiques françaises aujourd’hui dirigée par son fils Aymard Houx-Wardiougue. A la veille de son centième anniversaire il réapparaît sans crier gare de l’hospice où sa famille l’avait condamné à vivre ses derniers jours… Le retour impromptu du vieux Léonce et la complicité qui va se créer entre le grand père et son petit fils, un dénommé Géraldo-Georges trentenaire névrosé qui passe sa vie aux toilettes, va venir chambouler la petite mécanique bien huilée de cette famille bourgeoise…

Par melville, le 25 mars 2010

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Notre avis sur LÉON LA CAME #1 – Léon la came

Léon la came est une série qui a connue sa première publication vers la fin des années 90. Encensée par la critique et les libraires, elle n’a pas eu le succès escompté auprès du grand public. C’est donc aujourd’hui, avec la réédition du premier tome, l’occasion de renouer avec ce véritable monument de la bande dessinée.

Personnellement je dois bien reconnaître que j’ignorais totalement l’existence de cette bande dessinée jusqu’à ce que mon libraire me la conseille en me disant :"Il faut que tu me lises ça, tu peux y aller les yeux fermés !". J’ai donc comme souvent suivi son conseil sans lui en demander d’avantage sur la nature de l’album recommandé. Du coup je ne savais pas du tout à quoi m’attendre et la lecture de Léon la came a été pour moi une succession complexe de sentiments allant du déroutement totale à la fascination sans borne…
Le trouble que l’on peut ressentir au début de la lecture vient du fait que le scénario est construit de sorte que dès les premières pages on entre de front dans l’histoire. On est immédiatement confronté à la décadence et la cruauté des premières scènes, comme pris de court par la crudité du ton de ces personnages que l’on ne connaît pas encore… Sylvain Chomet dresse avec Léon la came un portrait au vitriole à l’humour corrosive et grinçante d’une famille bourgeoise où les faux semblants, l’hypocrisie et en fin de compte la bêtise humaine sont les maîtres mots. Le récit est construit comme un long flash back qui nous permet d’appréhender l’histoire de la famille Houx-Wardiougue et d’ainsi comprendre comment les personnages des premières planches en sont arrivés là. On fait donc la connaissance de Léonce Houx-Wardiougue, dit Léon la came, aujourd’hui âgé de près d’une centaine d’année et fondateur d’une entreprise de cosmétique – fleuront de l’industrie française – désormais dirigée d’une main de fer par son fils Aymard. L’arrivée du grand père va venir perturber la quiétude apparente de la famille, car le vieux Léonce est revenu pour remuer toute cette merde, si vous me pardonnez l’expression. Personnage fantasque, libertin et syndiqué (un vrai rouge en son temps), il n’y a qu’à voir la couverture : une cigarette à la bouche (et qui ne contient pas que du tabac), l’œil plein de malice et un couteau à la main, voilà bien le portrait de celui qui se fait appeler Léon la came… On fait également la connaissance du fils d’Aymard Houx-Wardiougue et donc du petit fils de Léon, Géraldo-Georges que ce dernier surnomme Gégé. Géraldo-Georges, (ou Gégé, c’est comme on veut) est un trentenaire mal dans sa peau. Littéralement écrasé par son père il a développé une profonde névrose et passe le plus clair de son temps aux toilettes en proie à des dérèglements intestinaux sous le joug de grises d’angoisse devenues monnaie courante. Constamment humilié par tous les gens qui l’entoure il trouve chez son pépé le père qu’il n’a jamais eu et aidé par ce dernier et ses fameuses cigarettes, Géraldo-Georges va petit à petit reprendre confiance en lui. Finalement véritable héros de cette histoire Géraldo-Georges est un personnage troublant car il inspire à la fois une profonde et sincère pitié mêlée de temps à autres d’un sentiment de trop… Ce duo détonnant avec le vieux Léon dans le rôle du vengeur et son petit fils Gégé dans celui de la victime des maux de la petite bourgeoisie capitaliste et mesquine est mené d’une main de maître par Sylvain Chomet. Certains passages sont drôles, d’autres franchements glauques et sordides, mais tous sont toujours traités avec une grande acidité et non sans un brin de malice.
Le dessin de Nicolas de Crecy est à l’image du scénario, acéré, nerveux et cruel avec les personnages. Il ne fait pas de concession avec les défauts de chacun et les accentuent même légèrement. Son trait renforce encore un peu plus l’aspect corrosif de l’atmosphère générale qui se dégage de ce roman graphique. Et comme pour adoucir un peu le tout, les couleurs de Nicolas de Crecy sont douces et apaisantes : le contraste obtenu est vraiment intéressant.

Voilà, ce premier tome Léon la came de la série du même nom (qui comprend en tout trois volumes) est un véritable hymne à la différence et à la liberté. Il dénonce avec brio les bassesses d’une société corrompue et en mal de vivre. Violent moralement, cruel, acide mais fascinant et malicieux Léon la came est un récit rare à lire absolument !

Par melville, le 25 mars 2010

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