LES CRIEURS DU CRIME - La belle époque du fait divers

En février 1907, Valentin, 30 ans, se prépare à partir en voyage de noce avec sa dulcinée Marguerite. Leur destination sera Venise. Malheureusement, la disparition d’une petite fille, probablement assassinée par un dénommé Soleilland, va compromettre ce projet et obliger Valentin, petit reporter de métier, à couvrir le sinistre évènement pour le compte de son patron, Lachaise, et de son journal. Se nourrissant plutôt des racontars de confrères et des éléments de la rue, Valentin, aspirant à un certain renouveau dans sa condition, contribue à enflammer le débat public en cherchant comme nombre de ses pairs le sensationnel. Le déballage journalistique qui en découle au fil des jours contribue à susciter une émotion populaire flagrante. Est-ce que cette affaire sordide serait de nature à relancer le débat sur la peine de mort ?

Par phibes, le 2 octobre 2024

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Notre avis sur LES CRIEURS DU CRIME – La belle époque du fait divers

S’emparant d’un véritable fait divers qui a marqué profondément les esprits français dans les premières années du 20ème siècle, Sylvain Venayre (Mon album Platini, A la recherche de Mobby Dick, Milady ou le mystère des Mousquetaires…) a pris pour parti d’élaborer son projet sous un angle original. En effet, par ce terrible assassinat, le scénariste a souhaité en quelque sorte mettre en exergue la puissance des médias sur l’opinion publique et l’a traduit via les pérégrinations journalistiques de son héros de fiction Valentin.

A ce titre, il n’est pas forcément question d’enquête policière proprement dite mais plutôt l’évocation d’une affaire vécue par le reporter d’un petit journal dont la direction n’aspire qu’à augmenter son tirage en s’alimentant des faits divers. Très bien documenté, faisant appel à de solides références à de nombreuses reprises (littéraires, politiques… voir lexique en fin d’album), le récit se veut « l’arrière-boutique » des recherches menées par la police avec un Valentin un rien décalé et passablement diminué, souvent pris à parti dans les discussions avec ses confrères, son entourage proche et sans grand éclat socialement parlant.

Cette vision de cette époque où les faits divers criminels, criés jusque dans la rue, prenaient l’opinion publique en otage semble trouver une résonnance à notre actualité. Il ne fait aucun doute que cette mise en lumière qui met également sur le tapis la fameuse question de la peine de mort est particulièrement captivante et a le privilège de nous faire découvrir une société en pleine évolution dans laquelle l’insécurité, éveillée par les médias, prend des proportions impressionnantes.

Graphiquement, Hugues Micol (Agughia, Black-out, Saint Rose…) nous offre un éclairage de toute beauté. Se munissant cette fois-ci de pinceaux et de gouache, l’artiste a le privilège de trouver une inspiration des plus judicieuses pour camper l’année 1907. Sans pour autant œuvrer dans la caricature, il met en présence des personnages assez caractérisés, mis en évidence dans des vignettes grouillantes de références d’époque (d’où recherches avérées). On saluera tout particulièrement ses transitions matérialisées par des doubles pages ô combien remarquables mettant en lumière des paysages urbains superbement croqués et colorisés ostensiblement.

Un one-shot historique puissant dans ses propos et dans son graphisme à découvrir chez Delcourt dans sa collection La Découverte Delcourt.

Par Phibes, le 2 octobre 2024

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