Les mémoires de la Shoah
En 1995, Annick Cojean, journaliste au Monde, décide de réaliser un reportage pour comprendre ce que chacun a retenu de la Shoah. Il y a d’abord la question de la transmission des victimes elles-mêmes, qui ont longtemps éludé les horreurs qu’elles ont vécues. Annick Cojean en rencontre plusieurs. Mais elle décide d’interviewer également les descendants des victimes, ainsi que des enfants de nazis impliqués dans la Solution Finale.
Ce livre raconte l’enquête, pour laquelle Annick Cojean recevra, en 1996, le Prix Albert Londres.
Par legoffe, le 10 février 2025
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ISBN :
9782808504881
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Notre avis sur Les mémoires de la Shoah
J’ai lu un certain nombre de livres sur l’extermination des Juifs sous le régime nazi. Mais l’approche de cet album est vraiment différente. D’abord, il s’agit de vivre l’enquête d’Annick Cojean, à ses côtés, grâce au scénario brillamment construit par Théa Rojzman. Elle n’explique pas la Shoah ; elle relate les témoignages des gens qui l’ont vécue, mais aussi ceux de leurs descendants. C’est bouleversant.
La première partie permet de découvrir les sentiments, les émotions et les tourments des survivants de la Shoah, tourments dont la nature est parfois très inattendue. La culpabilité et la honte ne sont, en effet, pas absents des récits des victimes et c’est aussi troublant que triste.
Mais la parole des enfants de ces survivants nous touche également au plus profond de notre âme. Annick Cojean nous fait soudain comprendre tout le poids porté par les générations suivantes, d’autant que l’accompagnement psychologique n’était pas celui que l’on peut escompter à notre époque moderne. L’émotion est à fleur de peau. Et cela n’est pas fini.
La journaliste décide, en effet, de boucler son reportage en allant rendre visite à des enfants de Nazis. On découvre alors avec la même surprise les troubles engendrés par cet héritage maudit. Et, une fois encore, nous n’en ressortons pas indemnes.
Cette plongée est d’autant plus réussie que les dessins de Tamia Baudouin sont à la fois doux et puissants. Elle parvient à capter les espoirs des témoins autant que leurs visions de cauchemar. L’art est ici doublé d’une grande efficacité, pour nous faire vivre avec justesse les propos rapportées par Annick Cojean.
C’est très certainement les yeux humides que vous terminerez la lecture. Mais quelle leçon pour tous. Vous ne pourrez que ressentir de la compassion pour tous les témoins rencontrés. Mais vous aurez aussi le souhait de voir le plus de gens possible lire cet album, pour réveiller les consciences et dire non à la haine, d’où qu’elle provienne.
C’est sans doute l’une des bandes dessinées les plus bouleversantes qu’il m’ait été donné de lire récemment. On ne peut que saluer le travail des autrices pour remettre sous les projecteurs cette enquête qui eut, à l’époque, le mérite de poser de nouvelles questions sur la Shoah. Une lecture indispensable en cette année des 80 ans de la libération des camps de concentration. Elle est aussi là pour rappeler les drames qui peuvent naître de toutes les formes d’intolérances ou d’exclusions.
Par Legoffe, le 10 février 2025
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