L'espion d'Orient

Johann Ludwig Burckhardt est au bord du désespoir. Malgré ses lettres de recommandation, il ne trouve pas de travail à Londres. Il se demande s’il a bien fait de quitter sa Suisse natale. Mais pouvait-il imaginer que l’économie anglaise serait à ce point en berne, la faute au blocus décrété par Napoléon ? 

Le jeune homme fréquente des cercles littéraires et scientifiques. Il découvre, à cette occasion, que l’Association Africaine recherche des candidats pour explorer l’Afrique Centrale, dont on ne connaît presque rien. Les enjeux géopolitiques sont, en effet, majeurs.

Mais nul ne se bouscule pour mener de telles expéditions car la mort attend souvent les intrépides. 

Burckhardt décide de se porter candidat. L’association le prépare physiquement, mais aussi intellectuellement. Il doit beaucoup se documenter sur les civilisations, arabes notamment, et parler presque couramment cette langue, et même lire le Coran dans le texte. 

Le 3 mars 1809, Burckhardt quitte l’Angleterre pour l’Afrique du Nord. Le début d’un périple de onze ans, s’intégrant aux peuples locaux pour aller le plus loin possible et fournir aux Anglais un maximum d’informations sur les régions traversées.

Par legoffe, le 21 janvier 2024

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Notre avis sur L’espion d’Orient

Quel destin que celui de Johann Ludwig Burckhardt ! Cet homme, originaire de Bâle, avait déjà eu l’audace de partir chercher du travail à Londres, loin de sa famille. Mais cette première initiative n’était rien à côté de l’incroyable voyage qu’il allait effectuer ensuite en Afrique.

Cet homme va notamment retrouver la fameuse cité oubliée de Pétra ainsi que les temple d’Abu Simbel, grâce à sa détermination, à ses connaissances et à sa curiosité. 

Mais un autre élément le démarque de tous les autres explorateurs. En effet, s’il a réussi à percer autant de secrets, c’est en raison de sa méthode, celle de se fondre dans la culture et les peuples des pays traversés. Plutôt que d’arriver en occidental, entouré de monde, il va apprendre l’arabe, s’habiller selon les coutumes locales et se présenter comme un cheikh. Cela s’apparente déjà à unexploit ! 

La bande dessinée permet de suivre sa préparation puis le voyage impressionnant, qu’il va effectuer au péril de sa vie. On apprend alors beaucoup sur la situation historique, sur le fait que des multitudes de peuples ou de clans se disputent ces territoires. 

En lisant ce roman graphique, on mesure, en partie, les problèmes du Moyen-Orient d’aujourd’hui. Le lecteur constate combien la France et l’Angleterre, qui lorgnaient sur la maîtrise de ces terres, n’en ont pas toujours bien compris le contexte et les enjeux.

Danièle Masse a écrit un scénario assez classique, mais elle a parfaitement su retranscrire l’état d’esprit de Burckhardt, dont l’empathie et l’intelligence forcent d’admiration. Au delà de l’aventure, l’approche spirituelle du personnage ressort parfaitement de l’album. 

Elle a su, par ailleurs, s’entourer d’un dessinateur de talent pour faire ressortir l’autre force de ce voyage : les paysages. Les planches d’Alexis Vitrebert ont quelque chose d’envoutant. C’est vrai pour les décors comme pour les regards des protagonistes. Ils dégagent une force et une authenticité qui rendent le livre d’autant plus puissant. 

C’est un voyage à travers l’Orient et l’Afrique dont on ressort indéniablement touché, ne voyant jamais passer le temps au fil des 150 pages qui composent cette belle bande dessinée.

Par Legoffe, le 21 janvier 2024

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