L'Héritage Wagner

En 1961, la jeune et très talentueuse chanteuse d’opéra Anje Silja, surnommée simplement « La Silja » par ses innombrables fans, débarque à Bayreuth, en Allemagne. C’est le fief de la famille Wagner qui y organise un festival ou sont représentés tous les opéra de leur illustre grand-père. Cependant, Wieland Wagner, le petit fils de Wagner et le metteur en scène du spectacle ou Anje jouera, s’est éperdument amouraché de la jeune femme qui est bien décidée à pousser son amant à s’affranchir du poids de sa famille et donner libre court à sa créativité, quitte à aller à l’encontre des volontés de sa propre mère et de celui qui la tient de près, le machiavélique Bodo Lafferentz, un ancien nazi qui n’accepte pas que l’on trahisse les doctrines de son Reich et de son symbole, Wagner…

Par fredgri, le 6 juin 2023

Publicité

Notre avis sur L’Héritage Wagner

À travers cet album, nous replongeons dans l’histoire sombre des années Nazies et de ces idées qui se perpétuent bien malheureusement encore aujourd’hui. Tout se déroule dans l’entourage de la famille Wagner qui a jadis fraternisé avec le régime Nazi, bénéficiant ainsi des largesses du Fuhrer et de sa garde rapprochée.
On est cœur de ces familles bourgeoises qui n’ont peut-être pas complètement adhéré aux idées de leur dirigeants, mais qui par leur ronds de jambe, par les multiples célébrations intéressées au nom d’Hitler, se sont rendus complices des exactions nazis.
Après quelques flash-back qui nous permettent de contextualiser, de replacer l’histoire allemande, l’occupation nazie et la violence vis à vis des juifs, nous nous retrouvons en 1961, quelques années après la fin de la guerre, certes, mais pas encore assez loin pour que les esprits se soient assagis, notamment ceux des anciens militants qui rêvent au retour d’un Reich triomphant. Et toute la finesse du scénario vient justement de cette ambiguïté. Oui, l’Allemagne a perdu, oui, les nazis ont été officiellement condamnés par l’Histoire, néanmoins on ne détruit pas une idée comme ça, surtout quand, implicitement, elle est entretenue par ceux qui veulent absolument préserver l’esprit d’une époque conquérante, glorieuse, qui se servent de l’héritage Wagner pour transmettre leur message auprès de tous les sympathisants à la cause qui continuent d’opérer en secret.

Anja, c’est cette jeunesse pleine de vie et d’audace qui veut justement s’abstraire des idées sclérosées du passé, et plus particulièrement de cette Histoire qui fait tâche. Après tout, que lui importe réellement ce bagage nazi, l’histoire de la famille de Wieland, celui qu’elle aime, elle veut juste qu’il coupe le cordon, qu’ils puissent s’épanouir ensemble. Mais voilà, tout est à nouveau symbole et Wieland a un rôle à tenir…

Le scénario est très habilement mené d’un point à l’autre. On sent que les affrontements ne sont pas loin entre la jeune actrice et cette famille engluée dans la tradition et la « cause », que derrière un simple festival, quelques représentations il y a des enjeux qui prennent le dessus, ancrés dans le passé. On se laisse emporter dans cette intrigue captivante, servie par les sublimes planches d’Emilio Van Der Zuiden. Anja est magnifique de sensualité, le trait est doux, suave et envoutant. On est envouté par le charme qui glisse entre les pages, sans pour autant oublier le cadre et la tension du récit.

Un très bel album. Très conseillé.

Par FredGri, le 7 juin 2023

Nos interviews, actus, previews et concours

À propos

Actualités, interviews, previews, galeries et concours.

Publicité