LOLITA HR (NOUVELLE ÉDITION)
Rock Star

Ce premier album de Lolita HR, publié par les éditions Eidola, a une longue histoire éditoriale derrière lui.
Tout d’abord publié par les Humano en 2007 (et sérialisé dans Shôgun Mag, en parallèle) et réédité une première fois sous le nom de a.doll.a en 2008 il n’y aura malheureusement que deux albums à chaque fois. Les auteurs réussissent ensuite à récupérer les droits et créent leur propre boite d’édition: Eidola. C’est alors l’occasion de faire les choses comme ils le veulent, de choisir le bon format, le bon papier et de relancer cette très intéressante série…

Car sous ce vernis faussement destiné aux ado, Lolita HR apparait très vite comme une série qui brasse des idées très intéressantes, très profondes. Delphine Rieu (plus connue en tant que coloriste d’ailleurs) dépeint un monde dystopique ou le gouvernement maintient sa population sous tension avec la menace d’un terrible virus qui la transforme et la terrifie.
Elle développe alors plusieurs fils conducteurs. D’une part, il y a le jeune Medhi qui vivote comme il peut, avec pour seule véritable passion l’image de cette chanteuse qui l’obsède. Il se fait alors piéger par un trafiquant et se retrouve en prison, à sa sortie il finit par rencontrer la résistance… Ensuite, il y a Lolita, pur produit marketing savamment dosé, qui s’avère n’être qu’une poupée manipulée, sans véritable âme… Au dessus de tout ça il y a les gouvernants qui tirent les ficelles, qui échafaudent des plans toujours plus tordus les uns que les autres !

Il faut dire que malgré ce fond assez complexe et dense la narration est par contre très enlevée et parfaitement rythmée. On se laisse entraîner en dévorant les planches, sautant d’un fil à l’autre, suivant les pistes qui s’ouvrent devant nous. C’est passionnant, intelligent et en fin de compte plutôt pertinent !
Car ce monde qui nous est proposé démontre parfaitement que l’opinion générale est facilement manipulable, qu’il suffit de presser le bon bouton, sous le bon angle pour obtenir le bon résultat. De même qu’un habile contre pouvoir peut très bien devenir une arme de propagande idéale pour le pouvoir en place… ! Ainsi, Lolita HR ne se contente pas de n’être qu’un manga à l’européenne, un brin fashion, il y a un concept derrière qui mérite amplement l’achat des différents volumes !

Aux dessins on retrouve Javier Rodriguez que l’on connait entre autre pour ses travaux chez Marvel ces dernières années, surtout en tant que coloriste lui aussi, mais aussi en tant que dessinateur (Spider-Man, Daredevil…). Son trait se rapproche donc de gens comme Marcos Martin, un style très gracieux, très propre et épuré, sans fioriture ni artifice, c’est très beau et très expressif. Un vrai bonheur pour les yeux qui correspond parfaitement à l’ambiance de la série, d’autant que tout est en noir et blanc, servi par un jeu de tramage bien dosé !

Une série très intrigante que je vous conseille vivement, surtout dans cette version définitive, avec un papier assez épais, couverture sur papier à grain. Le touché, l’intelligence et la beauté… Qu’attendez-vous ?

Par FredGri, le 3 avril 2015