MAREE HAUTE

Baños Pleamar est un établissement touristique espagnol de bord de mer qui a été créé en 1971 comme bien d’autres au moment où les plages de Badalone étaient polluées et impropres à la baignade. Proposant restauration et piscine, il faisait la joie de tous les fervents de la côte catalane. Dans les années 90, la plage a été dépolluée mais le site est resté dans son jus. Le jeune Isaac y vit avec ses parents, ses deux sœurs et son frère au rythme des saisons et du fonctionnement de l’établissement. Le garçon, féru d’illustrations, y partage des moments à la fois tendres et animés, tantôt bercés par des mélopées traditionnelles, tantôt ponctués par des réparties et des actes hauts en couleur d’Andrés, le patron des lieux, et de son épouse Palmira. Ces moments qu’il vit au sein de ce bâtiment bien baroque et bientôt en perdition resteront à tout jamais gravés dans son esprit.

Par phibes, le 18 juillet 2024

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Notre avis sur MAREE HAUTE

Isaac Sánchez est d’origine espagnole et a réellement vécu dans ses jeunes années à Badalone dans la province barcelonnaise. Plus précisément, il a grandi au sein du Baños Pleamar, un établissement de bord de mer construit pour palier l’impossibilité de profiter des eaux et de la plage badalonaise impropres à leur utilisation. Très marqué par ces temps durant lesquels son existence s’est calquée sur le rythme qu’imposaient le fameux bâtiment et également ceux qui y résidaient, il a décidé de coucher sur le papier les souvenirs qu’il a retenu de cette période.

Ce roman graphique donne l’occasion à cet artiste de flirter pour la première fois avec le lectorat français, et ce, grâce à l’appui de la Maison Dupuis. Son objectif est de nous exposer un récit autobiographique construit à partir de ses souvenirs d’enfance. Tantôt réel, tantôt un brin fantasmé, cet appel à la mémoire offre à l’auteur de nous ouvrir sur son intimité passée, celle vécue lors d’une période durant laquelle il n’avait pas plus 9/10 ans.

Structuré adroitement, l’album se décline en chapitres bien distincts. Chacun (qui s’ouvre sur une incrustation de photos souvenir) permet à Isaac Sánchez d’évoquer en toute simplicité une anecdote liée à sa famille, à lui-même, à ses chiens et bien sûr au bâtiment qui l’hébergeait. Grâce aux dialogues amusants, la tonalité est plutôt nature et les faits relatés se veulent en cohérence avec l’époque des années 90 inhérente à la culture espagnole. En particulier, l’auteur n’hésite pas à évoquer son père, personnage atypique qu’il mythifie délectablement, surprenant au premier abord et pas mauvais bougre lorsqu’on rentre en profondeur.

On perçoit beaucoup de tendresse et aussi de nostalgie dans ces visions d’enfant. Sous le couvert de nombreux repères liés à l’époque et de protagonistes communs bourrés de générosité, on se laisse happer par le récit, par le rapport entretenu par Isaac et les lieux de son enfance, par cette perception à la fois cocasse et touchante qui plane tout du long, par son intrigue et ses sentiments qui explosent au final.

En artiste complet et comme il se plait à l’évoquer dans son histoire personnelle, Isaac Sánchez sait dessiner. Il nous le prouve en cet album en nous offrant plusieurs facettes de son art. Le geste est semi-réaliste, voire semi-caricatural et fait preuve déjà d’une maturité qui ne demande qu’à s’amplifier. L’artiste s’amuse avec ses personnages tout en les respectant et marque des points de sentimentalité. Les univers fantasmés qu’il exploite sont bien à propos et campent subtilement les situations.

Un récit autobiographique des plus prenants à découvrir chez Dupuis.

Par Phibes, le 18 juillet 2024

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