MAUS
Et c'est là que mes ennuis ont commencé

Divisé en cinq chapitres de la vie à la mort, de la paix à la guerre, ce second récit clôt le roman « Maus ». Dans cet album, l’art de Spiegelman se met au service du souvenir, de sa famille et de lui-même.
Ainsi sont décrits, les fosses remplies de chaux vive dans lesquels étaient jetés les cadavres …mais aussi les vivants ; les camps ; la maladie ; l’humiliation extrême et la cruauté ; mais aussi le miracle de l’instinct de survie qui sauva Vladeck Spiegleman, l’amour d’un homme et d’une femme surmontant tous les obstacles et l’incroyable destin de personnages dont on dirait qu’ils sont tout simplement lumineux.

Par MARIE, le 1 janvier 2001

Notre avis sur MAUS #2 – Et c’est là que mes ennuis ont commencé

Quelques années plus tard (après l’achèvement du premier volume de cette œuvre forte et très éprouvante pour l’auteur), Spiegleman reprend son magnéto, sa table à dessin et flotte entre l’écoute de la voix de son père, disparu entre temps, et les souvenirs qu’il en a.
Nous sommes en 1986, Vladek est décédé en 1982. Le début de « Maus » remonte à 1978 et l’œuvre se termine en 1991. Il aura fallut 14 ans pour construire un pont entre sa vie, celle de ses parents, celle du peuple juif, son histoire et l’Histoire.

La bande dessinée se prête naturellement au témoignage à force d’images et de dessins, mettant en avant émotions, sentiments et opinions. Mais Maus n’est pas qu’un témoignage sur l’histoire de l’holocauste ou des abominations révélées dont on n’ose encore à peine parler, Maus c’est aussi l’histoire d’un homme ne se résignant pas, n’ayant pas cédé à la tentation de suivre un destin tracé, celui de ne survivre que pour se souvenir et honorer par là même ses origines. Non, il n’y a pas que ça dans « Maus » même si la pudeur voudrait qu’on s’efface tous et qu’on reste silencieux devant la douleur de l’autre.

Art Spiegleman n’a pas accepté définitivement cette place de rescapé par procuration. Alors il clame lui aussi son existence malgré son frère, malgré son père, sa mère et les autres.
Rien ne fera changer les faits et en cela, son sacrifice serait inutile. Alors il existe en tant qu’individu et c’est le début de deuxième album. Il s’adresse aux journalistes et peut être est-ce là que le récit devient plus fort voire différent, qu’il a cette accroche qui nous plaît et qui le fait sortir du lot. 

Le discours se balade entre les scènes de guerre racontées de façon directe et justement détaillées, assez pour que nous, lecteurs, sentions les odeurs dont il parle, imaginions les angoisses, ayons mal au ventre et finalement regardions nos pieds soignés et protégés comme pour nous rassurer que nous ne sommes pas dans une réalité palpable mais bien dans un livre. Cette alternance entre le cauchemar d’Auschwitz et les scènes de la vie quotidienne nous permet de reprendre notre souffle et de constater que les personnages sont « réels » et font, en marge de l’Histoire, ce que tous les hommes font dans leur quotidien.

Ajouté à cela que le caractère et la personnalité des individus peut être plus ou moins accrocheurs et qu’en l’occurrence, Vladek est un héros hors norme, mêlant le souvenir à la réalité et projetant un hypothétique futur totalement obsolète dans lequel Art, son fils, a bien évidemment sa propre vie. Alors les détails fusent et l’humour et la tendresse trouvent une incroyable place au fil des pages entre l’horreur, la colère et la consternation.

Cet exercice sans concession aucune, ni à propos de la guerre ni à propos des hommes est une totale réussite dans ce que le roman graphique peut faire. Ainsi, sans que l’auteur ne puisse le deviner, se racontant et racontant la vie de sa famille avec une réelle sincérité, il créée une œuvre de souvenirs et une œuvre de référence.Les institutions s’en servent aujourd’hui pour transmettre par cette autre voie qu’est celle de la bande dessinée. L’art est universel comme les faits de guerre et Maus est une pierre de plus à l’édifice culturel.

Ne ratez pas cette œuvre majeure.

Par MARIE, le 3 février 2007

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