Mitterrand Requiem

Joel Callède n’arrête pas de nous surprendre dans ses œuvres.
Déjà, avec Les Enchainés, il m’avait épaté. Son XIII Mystery est l’un des meilleurs de la série et là, sort son Mitterrand Requiem, une œuvre dont il est scénariste ET dessinateur !
Je peux vous certifier que ce livre est une très bonne lecture et l’une des meilleures surprises de cette année 2016.

Surprise, parce que je ne m’attendais vraiment pas à un tel récit.
Ce Mitterrand Requiem est une lecture passionnante et prenante sur cet homme, ce Président de la République, cet homme de Gauche, à la fois complexe et exceptionnel aussi. Callède aurait pu faire un énième roman sur Mitterrand, mais il a eu le courage et la très bonne idée d’en faire une bande dessinée assez remarquable, que ce soit par la force du texte et par la puissance du dessin.
Joel Callède, comme il nous le dit dans sa préface, a été marqué par cet homme, il a marché "sur ses pas" dans les terres landaises, marqué aussi par sa présidence, surtout lors de la deuxième élection. Le scénariste se lance avec Mitterrand, au crépuscule de sa vie, qui va vivre une expérience spirituelle et intime où, il croise quelques personnages étonnants comme par exemple Moulin ou Jaurès, ou encore d’entrée, avec Anubis, le dieu égyptien, qui lui sert de guide.
Joel Callède nous raconte les moments forts de la vie de Mitterrand où, lors de ses rencontres avec ces gens du passé et un Mitterrand bien plus jeune, il revient sur ses actes, ses ambiguïtés concernant par exemple sa période de résistant et sa relation avec Pétain ou encore l’abolition de la peine de mort et sa signature dans les années 50, lors de la condamnation à mort de certains militants algériens.
L’auteur revient aussi sur d’autres moments importants de la vie en tant que Président de la République. Il montre l’homme et le père de famille. L’homme et ses "infidélités". Le passage où Mitterrand en parle avec sa femme Danielle est un des moments forts du livre, un des moments où le Président parait le plus faible. Les dialogues sont très bons, ils sont aussi l’une des forces de ce livre. Je pense à ce passage, où lors de son élection le 10 mai 1981, Mitterrand se rend au Panthéon et où il croise Jaurès et Moulin, qui ne sont tendre avec lui.
Joel Callède nous raconte aussi l’histoire d’un homme, qui est surement LE dernier grand Président de la Vème République. Mitterrand avait dit : "Je suis le dernier des grands présidents. Après moi, il n’y aura plus que des financiers et des comptables.” L’histoire, pour l’instant, continue de lui donner raison. Et Callède nous le rappelle dans son livre.

Graphiquement, Callède impressionne aussi.
Jamais, je me serais dit qu’il allait illustrer avec un si grand talent sa propre bande dessinée. Il réalise des planches assez incroyables, d’une puissance visuelle qui nous marque. Il met en scène son Mitterrand dans des scènes fortes. Par exemple, la rencontre Anubis/Mitterrand est assez incroyable. Les couleurs de Christian Favrelle apportent beaucoup à cette œuvre. Il impose des aplats de couleurs vives (comme le rouge sur le passage de la guillotine) qui marquent les esprits.

Ce Mitterrand Requiem est un roman graphique intelligent dans sa forme et son fond, qui permet de retrouver le Président François Mitterrand et l’ambivalence, la complexité que rythmèrent sa vie en tant qu’homme, en tant que résistant, en tant que politique et en tant que chef d’état.
Une œuvre bouleversante, intelligente et qui fait réflechir que je vous invite à lire si ce n’ai déjà fait.

Par BERTHOLD, le 17 avril 2016