Monarques

Et si ce fromage que tenait le corbeau dans son bec, et qu’il finit par laisser tomber au profit de Maître Renard, avait entrainé une guerre terrible entre les animaux ?

De cette situation initiale, partiellement empruntée à Jean de La Fontaine, Rom Montalban (dessin) et Guillaume Plassans (scénario) construisent avec Monarques une surprenante BD écrite en grande partie en alexandrins, tout en y insérant des répliques beaucoup plus directes et modernes. Louis, le roi lion, en despote éclairé, a réussi à imposer la paix dans ce monde qui se déchirait, mais il reçoit en son château une délégation de corbeaux et de renards pour tenter une médiation.

On débouche alors dans une véritable intrigue politico-diplomatique, chacun rêvant de pouvoir, et où Jean, fils de Louis, aimerait être davantage associé aux affaires de l’État. Rom Montalban signe un dessin au fusain et crayon particulièrement bluffant, créant une atmosphère noire et pesante, nous emmenant de manière convaincante dans les arcanes de ce pouvoir vacillant. C’est graphiquement une réussite !

Si l’idée de dialogues en vers pouvait laisser craindre quant à lui la « fausse bonne idée » déjà vue, on oublie très vite que l’on ne lit plus de la prose ! Guillaume Plassans, que les amateurs de BD connaissent sous le pseudo de PoPésie, grâce à ses Turbo aux éditions Lapin, prouve encore son habileté dans l’art de manier les mots. C’est fort bien écrit, on oublie vite La Fontaine pour se plonger dans une histoire originale où l’idéal de paix et d’égalité prôné par le roi des animaux s’éloigne au fur et à mesure que les prétendants voient l’accession au trône possible.

Monarques est un album singulier, parfaitement maîtrisé, et passionnant de bout en bout ! Vivement conseillé !

Par V. DEGACHE, le 27 octobre 2024