Mongo est un troll

Comme chaque année, en plein hiver, Duane et Cameron, deux vielles badernes sans scrupule et un tantinet violentes, portées sur la boisson et le pillage de tombes, font le tour des villages qui participent aux festivales. Vivant au jour le jour, se sustentant au détriment de l’habitant, les deux individus déambulent à travers un territoire peuplé d’êtres fantastiques à la recherche de l’hypothétique mère de Cameron, guérisseuse de son état. A la suite d’un énième coup raté qui les met en fuite, les deux vieux finissent par tomber sur une belle sorcière qui se nomme Claire Woodward, elle-même en pleine errance. Intrigués par la jeune femme, ils décident tout de même de la prendre avec eux et de lui faire partager leurs recherches. Evidemment, le chemin qu’ils vont parcourir ensemble va révéler bien des dangers à commencer par la rencontre d’un grand gobelin durant laquelle Cameron va devoir faire don d’une partie de lui-même.

Par phibes, le 20 octobre 2014

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Notre avis sur Mongo est un troll

On connaît Philippe Squarzoni entre autres pour ses remarquables et sérieux travaux documentaires particulièrement étayés réalisés pour Dol, un ouvrage qui fait le bilan du dernier septennat de J. Chirac et pour Saison Brume, un recueil sur les bouleversements climatiques paru respectivement en 2007 et 2012 aux éditions Delcourt. Avec Mongo est un troll, l’artiste nous offre une toute autre facette de son talent, à l’opposée de la précédente, en nous introduisant dans une épopée qui se nourrit aisément de l’univers fantasy.

Sous le couvert d’un titre interpellant (et qui sciemment ne trouvera de réponse effective), le récit présenté nous met rapidement en présence avec les trois protagonistes principaux (certes au départ de façon alternée mais ensuite de manière unique) dans des pérégrinations qui ne manqueront pas de donner le ton, un ton à la fois décalé et gorgé d’imaginaire. Sous le prétexte d’une errance motivée par la recherche d’une mère, l’on assiste à une ballade médiévale de deux avinés et d’une belle sorcière, un tantinet mystérieuse, à travers une contrée enneigée aux rencontres stupéfiantes.

Sans réellement donner un certain relief aux recherches de Duane et Cameron, Philippe Squarzoni s’amuse plutôt à faire déambuler la belle et ses deux grincheux de village en village, les faisant agir et surtout dialoguer dans des effets nature volontairement aberrants au cœur d’un monde qui n’en est pas moins. Aussi, on se gausse généreusement devant ces péripéties linéaires et fluides qui réunissent sous la même coupe vieux séniles bagarreurs, troll, musicien à tête de poulpe, kobolds, grand gobelin, magicienne étrange et bien d’autres encore.

Comme il l’indique lui-même, Philippe Squarzoni trouve ici son inspiration graphique dans l’association des univers inhérents à Bukowsky, Bosch et Brueghel. Il en ressort de fait un amalgame pictural à la fois recherché et épuré. En effet, l’artiste peut se vanter de travailler certains décors dans des aplats de noir des plus remarquables, traduisant un gros effort sur les ombres et sur les perspectives. A contrario, les personnages ont une effigie plus légère et également suffisante pour traduire les expressions. Enfin, le jeu de couleurs qui se veut sans excès a son charme et accompagne subtilement le dessin.

Un one-shot délirant et moderne qui ne manquera pas de titiller la curiosité des amateurs de récits de cet acabit et qui permet également de voir Philippe Squarzoni dans un autre registre beaucoup moins sérieux.

Par Phibes, le 20 octobre 2014

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