Mourir partir revenir, le jeu des hirondelles

Dans Beyrouth en guerre, dans Beyrouth coupée en deux par la folie meurtrière des hommes, la famille de la narratrice, une enfant, vit comme beaucoup d’autres sous la menace des obus et des balles des francs-tireurs. Leur maison, donnant sur la ligne de démarcation, est très exposée. Alors, barricadés dans leur maison dont seul l’espace le plus protégé (l’entrée) est resté lieu de vie, ces gens attendent. Attendent que tout ça s’arrête, bien évidemment, mais attendent aussi tous les jours que ceux qui sont sortis travailler, faire une course, ou rendre visite dans le voisinage reviennent sains et saufs…
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur Mourir partir revenir, le jeu des hirondelles

Lorsque je suis allé au Liban, en 2003, une femme m’avait parlé de la guerre que Beyrouth avait connue jusqu’en 1990, me disant qu’il lui était arrivé, gamine, de sortir de chez elle mais de devoir parfois trouver refuge chez d’autres lorsque les combats s’intensifiaient. Ces étapes obligées chez des voisins ou des amis, voire chez des inconnus duraient parfois plusieurs jours ; plusieurs jours terriblement longs pendant lesquels elle ne pouvait pas donner de ses nouvelles à ses parents et pendant lesquels ces derniers ne savaient pas non plus ce qui avait pu éventuellement arriver à leur fille… Quelle horreur, quel stress !

Lorsque j’ai découvert le livre de Zeina Abirached, j’ai tout de suite repensé à cette Libanaise que j’avais croisée dans un Liban revenu à la paix mais qui, depuis, a rebasculé dans l’instabilité. J’ai donc acheté Mourir partir revenir, le jeu des hirondelles avec l’envie de "réécouter", de manière différente et par une autre voix, un témoignage de ces interminables attentes.

Tout en noir et blanc, Mourir partir revenir, le jeu des hirondelles commence en présentant le quartier où se passera ensuite le huis-clos. Il est question de la ligne de démarcation entre Beyrouth Est et Beyrouth Ouest, des maisons et des protections de fortunes qui les masquent ; enfin des précautions à prendre lorsqu’on veut sortir.

D’entrée, le dessin de Zeina Abirached montre ses originalités : on a par exemple l’impression que les éléments de ses vignettes sont autant de petits visuels qu’elle vient ajouter sur une surface au départ vide jusqu’à ce que son dessin soit terminé. Empilements de parpaings, rangées de fûts… Un de plus ou un de moins ? Hop-hop, voilà qui est fait !

Le tout donne un résultat très géométrique, très stylé, avec ce trait gras que trace l’auteure, jouant avec les ronds et les carrés pour dessiner son histoire et composer ses planches. Zeina Abirached utilise énormément de séquences, aussi : beaucoup de vignettes se suivent et se ressemblent, n’évoluant de l’une à l’autre qu’avec certains détails changeant. Les personnages obéissent aussi à ces règles de représentation : avec leurs cheveux en multitudes de petites spirales ou leur visages composés comme avec des gommettes qu’utilisent les enfants pour composer graphiquement. Une sacrée galerie de portraits !

Un style sobre et une narration parfois très très lente, mais qui traduisent finalement bien ces malaises des attentes incertaines pendant lesquelles il faut malgré tout continuer à vivre et espérer.

Chronique de vie emmurée, Mourir partir revenir, le jeu des hirondelles est un témoignage important servi par un graphisme très personnel. Autant d’atouts qui ont valu à cette œuvre une nomination dans la sélection officielle du festival d’Angoulême 2008 (et une rapide première réédition). Un espoir peut-être hors de portée pour ce titre par rapport à d’autres en lice, mais en tout cas une mise en lumière bien méritée pour cette auteure et son travail à suivre.
 

Par Sylvestre, le 7 février 2008

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