NOS ADOPTIONS
Nous t'avons abandonné
Jung est à Séoul afin de recueillir des témoignages de familles qui ont abandonné leurs enfants pour qu’ils soient pris en charge par une agence spécialisée en vue d’une adoption internationale. C’est le cas d’Olivier son ami qui, comme lui, a été adopté en France. Jung retrouve avec peu d’éléments et beaucoup d’appréhension la famille biologique de son ami et lors de l’entretien qui en découle, découvre les raisons de cet abandon, des raisons qui ne sont pas sans soulever des souvenirs déchirants, partagés par des parents qui ont dû, à un moment de leur vie de jeunes adultes, faire face à des coups du sort rudes et à des décisions on ne peut plus douloureuses.
Par phibes, le 6 novembre 2024
Publicité
Notre avis sur NOS ADOPTIONS #2 – Nous t’avons abandonné
L’auteur de Couleur de peau : miel, de Babybox, du Voyage du Phoenix… revient sur cette thématique ô combien délicate qu’il a entamé lors de son premier album paru en octobre 2023 et qu’est l’adoption. Très impliqué dans ce sujet qui le concerne au premier chef – il est lui-même un adopté, il vient cette fois-ci nous offrir une autre facette de l’adoption, celle qui concerne les parents biologiques de ces enfants qui ont été durement délaissés.
Associé comme à la première heure à Laëtitia Marty, l’artiste se remet au centre des propos via une démarche personnelle qu’il a engagé pour trouver des témoignages de parents qui ont franchi le seuil de l’abandon. C’est ainsi qu’il est allé à Séoul, au-devant de personnes (en particulier les parents biologiques d’un ami français originaire de la Corée du Sud) pour tenter, avec respect, de comprendre ce geste radical contraire à l’ordre naturel des choses.
Force est de constater que le sujet est on ne peut plus sensible et que les coauteurs ont su le travailler sous la houlette d’une très grande humanité. A la faveur d’une narration bien pesée qui vient expliciter les tenants d’une telle démarche, les témoignages intimistes (il y en a quatre) se succèdent dans une émotivité ambiante très forte. Ces dépositions volontaires sont assurément fortes, attristantes, malmènent évidemment notre réceptivité et viennent cautionnées des envies d’indulgence voire de pardon.
In fine, ces déclarations malheureuses sont associées à des lettres réalisées par des adoptés au profit de leurs parents biologiques, lettres qui pour la plupart ont tendance à excuser ce geste répréhensible.
La partie graphique que Jung met en avant se veut dotée d’une certaine poésie. Sur de profonds aplats de noir, l’artiste diffuse son message un tantinet fantasmé qui génère une ambiance à la fois surréaliste et humainement sensible. Bien qu’il y ait beaucoup de gravité et d’émotions dans les propos, le dessinateur joue sur une esthétique sombre envoûtante proche de la féérie qui semble isoler les sujets.
Un deuxième tome remuant sur une thématique sensible qui touche à l’enfant et à la dislocation de ses attaches.
Par Phibes, le 6 novembre 2024