Oradour

Le 10 juin 1944, 643 habitants d’Oradour-sur-Glane, un paisible village de Haute-Vienne, sont massacrés par la division Das Reich, remontant vers le front de Normandie. Quelques-uns seulement échapperont à la barbarie nazie.

Par v-degache, le 22 mai 2024

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Notre avis sur Oradour

Oradour, publiée par les éditions Anspach, à l’occasion du 80ème anniversaire de la commémoration du massacre commis par les Waffen-SS de la 2e Panzerdivision Das Reich, dans le village de la Haute-Vienne d’Oradour-sur-Glane le 10 juin 1944, est né du souhait du dernier de la trentaine de survivants de la tragédie, Robert Hébras, qui a supervisé et validé la totalité du scénario et du découpage, et qui a pu lire la moitié des pages dessinées, avant de mourir le 11 février 2023.

Robert Hébras en 2008, dernier survivant du massacre, mort le 11 février 2023 (©René J. Laglstorfer)

L’ouvrage débute avec la découverte de l’horreur par Camille Senon, passagère du tramway arrivant de Limoges, et Jean Pailler, venu au village en camion, les deux échappant de peu à la tuerie.  Jean-François Miniac déroule ensuite un récit minutieux et sourcé des événements, nous plongeant dans ces heures d’horreurs, qui aboutirent à la mort de 643 personnes, dont 205 enfants, 247 femmes et 191 hommes.

Camille Senon et Jean Pailler découvrent l’horreur dans les ruines encore fumantes d’Oradour

On suit dans un premier temps les préparatifs de l’opération menés par Heinz Lammerding, Commandant de la Das Reich, et du Commandant du 1er bataillon du régiment Der Führer de la division Das Reich, Adolf Diekmann, qui dirigea les meurtres, mais aussi de représentants de la Milice. La division formée en 1939 est alors « au repos » après les lourdes pertes subies sur le front Est, et reçoit de nouvelles recrues, notamment alsaciennes. Elle va mener plusieurs actions de représailles contre les civils, suite à des opérations de la résistance, conformément aux instructions d’Hitler, afin de tenter de monter les populations locales contre ceux que les Nazis nomment « terroristes », comme le 9 juin à Tulle où 99 hommes sont pendus, alors que les hommes ont reçu l’ordre de rejoindre la Normandie suite au débarquement. La capture du Sturmbannführer Kämpfe par les maquisards le même jour ne fait que renforcer la soif de vengeance des SS.

Lammerding et Diekmann lancent une répression terrible suite à la multiplication des actions de la Résistance
Heinz Lammerding, Commandant de la Das Reich, finira tranquillement sa vie en Allemagne, à la tête d’une entreprise de BTP (©Fburgevin)
Adolf Diekmann, Commandant du 1er bataillon du régiment Der Führer de la division Das Reich, meurt sur le front de Normandie le 29 juin 1944

Le choix d’Oradour comme cible de la Das Reich est aussi questionné par les auteurs, reprenant la thèse la plus communément admise par les historiens, celle d’un village à l’écart des maquis, où les SS pourront procéder au massacre sans risques d’être dérangés.

Reprenant méthodiquement les témoignages des rares survivants et témoins, le scénariste Jean-François Miniac fait alors le récit de ces heures de barbarie, de l’encerclement méthodique du paisible village, où, ce 10 juin 1944, on arrive des hameaux alentours pour récupérer ses rations de viande et de tabac, jusqu’au rassemblement des habitants sur la place du Champ de foire où les hommes seront conduits dans différents lieux, femmes et enfants dans l’église. Le contraste qui se dégage entre ces habitants qui vaquent tranquillement à leurs occupations, et les SS qui commencent le regroupement à l’issue funeste est particulièrement saisissant et émouvant.

La population est regroupée sur le Champ de foire
Le Champ de foire aujourd’hui, avec la carcasse d’une Peugeot 202 calcinée (©Davdavlhu)

Quant au massacre en lui-même, Bruno Marivain le traite habilement. Sans éluder ces moments terribles, il les dessine en gardant la pudeur nécessaire, sans effet voyeuristes ou mise en scène spectaculaire et macabre. Son trait réaliste et les couleurs sobres de Cerise, oscillant dans les teintes ocres, suffisent à nous faire toucher l’indicible, sans besoin d’artifices malsains.

Les hommes sont mitraillés puis achevés par les SS
Les ruines de l’église aujourd’hui, où femmes et enfants périront (©Lune de Film)

L’Oradour de Marivain, Miniac et Cerise devra faire son trou face aux sorties quasi simultanées du Dernier témoin d’Oradour-sur Glane chez Harper Collins, et à celui d’Oradour-sur-Glane chez Petit à Petit. Gageons que son traitement méticuleux de la tragédie, symbole de la barbarie nazie en France, la fluidité du récit, et le réalisme du dessin sauront séduire les lecteurs.

Le dossier de fin d’ouvrage signé des historiens Dominique Danthieux et Philippe Grandcoing vient compléter avec intelligibilité, rigueur et synthèse le récit, appuyé de quelques photos.

Par V. DEGACHE, le 22 mai 2024

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